COMMENTAIRE

Tour de France
Ni héros ni zéro

Les champions ne font pas le Tour de France. C’est le Tour de France qui fait les champions. Cette vérité, les patrons de la Grande Boucle l’ont jetée à la face de ceux qui pleuraient l’absence de grandes stars au départ de Strasbourg le 1er juillet. Armstrong à la retraite après un septennat sans partage. Ullrich, Basso et compagnie à la maison pour leurs accointances supposées avec le sulfureux docteur Fuentes.
Au terme de 3657 km aux six coins de l’Hexagone, parcourus en près de nonante heures de course par les plus rapides, le constat s’impose: oui, l’épreuve a été passionnante à suivre, car incertaine jusqu’à la veille de l’arrivée. Elle a tenu bien davantage que ses promesses et révélé de nouveaux visages au grand public. Echappées au long cours, défaillances terribles, revirements tactiques et spectaculaires retournements de situation: le suspense a rendu à la course tout son intérêt, comme ce fut le cas avant les monologues d’Indurain dans les années nonante et d’Armstrong durant cette décennie.
Relégué au second rang par l’accaparement médiatique de la Coupe du monde, au début du mois, le Tour de France 2006 a ensuite gagné en intensité. Deuil fait des champions reconnus, suiveurs et téléspectateurs ont redécouvert une épreuve à visage humain. Le mérite en revient à tous ceux qui ont rallié les Champs-Elysées à la force du mollet. Qu’ils soient sur le podium, comme l’étonnant Floyd Landis, l’inattendu Oscar Pereiro et le complet Andreas Klöden. Ou qu’ils soient lanterne rouge, comme Wim Vansevenant qui, avec Gert Steegmans (137 sur 139), a contribué aux trois vic-toires d’étape de son coéquipier sprinter Robbie McEwen, par ailleurs maillot vert.
Comprenons-nous bien: il n’y a que les naïfs et les hypocrites pour croire que le récent coup de balai a éjecté tous les tricheurs du peloton. Raison de plus pour ignorer la moyenne horaire et relativiser les performances individuelles. L’occasion rêvée d’apprécier simplement la beauté du sport, et son incertitude, sans vouloir faire du premier un héros ni du dernier un zéro.

Sébastien Julan
25juillet 2006

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