FRIBOURG Cathédrale Saint-Nicolas

Un jeu de mécano en bois

A Fribourg, la cathédrale Saint-Nicolas est par excellence l’édifice construit en pierre. Mais le bois y est aussi roi, à l’image du beffroi abritant les cloches ou de la charpente qui est un vrai jeu de mécano. Visite de ces lieux auxquels le grand public ne peut pas accéder, avec François Guex, conseiller scientifique des Biens culturels.


Les éléments en bois de la cathédrale St-Nicolas ont été confectionnés avec une grande maîtrise technique comme la charpente et le beffroi ci-dessous

 

La charpente qui tient la toiture de la cathédrale Saint-Nicolas de Myre ressemble à «une sorte de grand mécano» ou encore à une énorme grange, explique François Guex (photo ci-contre), conseiller scientifique du Service cantonal des biens culturels. Une grange vraiment immense, puisque la nef mesure pas loin de 40 mètres de long! La densité de la poutraison est si abondante qu’on devine avec peine le faîte du toit.
L’enchevêtrement de toutes les poutres est, à lui seul, une vraie œuvre d’art qui force le respect. Outre des poutres latérales porteuses qui filent le long du bâtiment (qu’on appelle sablières), il y a des dizaines de poteaux verticaux, tandis que les contrefiches croisées (ces poutrelles en X qui masquent la vue sur le faîte) sont plus minces, ar-rangées en ré-seau. Ces éléments permettent de soutenir le toit, mais aussi de résister à des rafales de vent.
Le visiteur est encore plus en admiration quand il apprend que certains éléments de la poutraison du beffroi ont commencé à pousser au XIIIe siècle. Grâce au Laboratoire romand de dendrochronologie de Moudon, les spécialistes sont arrivés à déterminer qu’une des poutres en chêne provenait d’un arbre qui a grandi à l’époque où le comté de Gruyères est devenu un fief savoyard (1240). Soit près de 250 ans d’âge!
La dendrochronologie est une méthode de datation qui permet de déterminer la période durant laquelle un arbre a vécu et de préciser l’année et la saison de son abattage. Grâce à ce procédé, il est possible de dater très précisément tout objet ou structure en bois (charpente, plafond, retable, cité lacustre…), depuis quelque quarante ans.
La première partie de la charpente – qui s’élève jusqu’à 14 mètres de haut – a été réalisée entre 1409 et 1411. Elle a ensuite été remaniée en 1430 pour être définitivement terminée entre 1480 et 1490, soit après la bataille de Morat. La dendrochronologie montre que les bois ayant servi à l’édification ne sont pas homogènes. Cela signifie que les charpentiers et menuisiers ont couru la région entière pour obtenir des arbres et en façonner la structure portante du toit. La charpente est réalisée en chêne, en épicéa et en sapin blanc.
Autre lieu attrayant que le public ne peut pas visiter: le beffroi, qui abrite les 11 cloches de Saint-Nicolas. Mais, après la restauration prise en charge par la fondation de Saint-Nicolas, il devrait être possible de le voir. Tout en bois, le beffroi est indépendant de la tour en pierre pour que celle-ci ne vibre pas quand les cloches sonnent. «L’assemblage des éléments en chêne est un très beau travail de charpentier. Regardez le beffroi supérieur, qui a des contreforts latéraux courbes pour mieux tenir les éléments ensemble. C’est vraiment ingénieux!» lance François Guex.
Le chêne est la meilleure essence pour soutenir les cloches, dont le poids peut dépasser plusieurs tonnes. Le bourdon de Saint-Nicolas, qui a plus de 500 ans et fait 2,2 m de diamètre, pèse 7,3 tonnes. Certaines pièces de bois sont encastrées l’une dans l’autre. «Plus d’un chêne a fini sa vie dans cet endroit», souligne le conseiller scientifique des Biens culturels. Et tout ça tient depuis près de cinq siècles sans gros travaux d’assainissement…

Plus d’informations: www.cathedrale-fribourg.ch

Repères

1283 début de la construction de l’église.
1430 fin de la réalisation.
1490 la tour ouest est terminée.
1512 l’édifice religieux est élevé au rang de collégiale.
1828-1834 installation de l’orgue d’Aloys Mooser.
1896-1936 vitraux de Józef Mehoffer.
1924 le lieu saint devient la cathédrale du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg.


Christophe Schaller
25 juillet 2006

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