GRUYÈRE Police du lac

Patrouille en eaux tranquilles

Il a beau être petit, le lac de la Gruyère n’échappe pas à la surveillance de la police. Au moins une fois par semaine, les eaux retenues par le barrage de Rossens et leurs usagers ont droit à une visite de deux des huit agents de la brigade du lac. Reportage.


Une surcharge de passagers constitue l’infraction la plus fréquente sur le lac de la Gruyère. Mais les agents de la police du lac veillent au grain au moins une fois par semaine

 

Equipement obligatoire: lunet-tes à soleil, casquette et crème solaire. Mission: inspecter le lac de la Gruyère, ses plaisanciers et ses pêcheurs. Ce dimanche matin, les agents Vial et Oberson sillonnent les eaux émeraude retenues par le barrage de Rossens. Ils traquent les irrégularités et s’assurent que les lois sont respectées dans les moindres replis du paysage. Une tâche dont la police du lac fribourgeoise s’acquitte au moins une fois par semaine.
«Il m’a l’air bien chargé celui-là», fait remarquer Alexandre Oberson, qui appuie du même coup sur l’accélérateur. «Bonjour, c’est pour un contrôle», annonce son collègue Florian Vial, lorsque l’embarcation est assez proche pour l’entendre. «Je pourrais voir les papiers du bateau, s’il vous plaît?» Le temps de plonger sur la boîte hermétique, le matelot du dimanche lui tend la carte grise de son embarcation. «Vous pouvez me montrer aussi les gilets de sauvetage?»
La réglementation du lac de la Gruyère a beau limiter la puissance des bateaux à huit chevaux, les normes de sécurité n’en demeurent pas moins strictes (lire ci-dessous). «Une surcharge du bateau reste l’infraction la plus fréquente ici», affirme Florian Vial, au moment où s’éloignent la barque et ses passagers. Embarcations stationnées sur le lac alors qu’elles n’y sont pas autorisées, problèmes liés à l’état général des bateaux, immatriculation manquante ou encore puissance illégale du moteur figurent parmi les autres atteintes occasionnelles au règlement.

Rares sont les conflits
Sur la plage de La Roche, un vieux camping-car VW jaune donne des airs de Californie à la rive du lac. A quelques encablures, une quinzaine de bateaux patientent dans le port. Un petit aller et retour devant l’embarcadère donne le temps à un plaisancier de héler les agents. «Peut-être un problème de vol?» Moteurs et affaires de pêche ont en effet une fâcheuse tendance à disparaître.
«J’ai dû changer mon moteur et je n’ai pas encore pu l’expertiser. Est-ce que je peux quand même naviguer?» interroge un pêcheur. L’ambiance sur le lac de la Gruyère est plutôt bon enfant. «Le nombre de bateaux immatriculés fait qu’on connaît plus ou moins tout le monde. On sait que si on interpelle quelqu’un, il va s’arrêter. Les conflits sont rares.» Les policiers prendront tout de même la peine de contrôler l’état et la conformité du nouveau moteur avant de donner leur feu vert. Non sans prendre note de l’autorisation donnée. «On pourra vérifier qu’il se présente bien à l’expertise.»

«Un vrai petit paradis»
La vedette de la police met ensuite le cap sur Rossens. Avec son moteur de 75 chevaux, elle ne passe pas inaperçue sur la mer d’huile de ce matin de juillet. Petit salut aux estivants en goguette sur un mini-yacht. Avec la vitesse, l’air est presque encore frais, d’autant que le soleil joue à cache-cache avec les altocumulus. Sur les îles, les campeurs s’extirpent de leur tente et mettent en place leurs cannes à pêche. «Le lac de la Gruyère est un vrai petit paradis», commentent les policiers. Et ils espèrent bien qu’il le restera grâce au respect de ses usagers. «Les interdits sont bien plus nombreux sur les eaux des lacs de Morat ou de Neuchâtel.»
Avec un peu d’imagination, on distingue une tête d’éléphant dans les falaises de molasse qui tombent dans le lac près de Rossens. «On vient quelquefois plonger ici, indique Alexandre Oberson. Une plongée assez technique avec pas mal de vestiges d’arbres.» Lors des patrouilles sur le lac, ils viennent parfois se réfugier dans la fraîcheur de la caverne qui se cache quelques mètres plus loin. Pas de baignade? «Normalement pas, mais quand il fait chaud comme la semaine dernière…» Les gendarmes tombent alors leur polo et leurs bermudas bleus pour piquer une tête.
Encore quelques contrôles de routine sur le chemin du retour et les odeurs de grillades rappellent aux gendarmes que l’heure du dîner approche. «Cet après-midi, on aura sûrement plus de travail. En général, le dimanche, les gens décident de traverser le lac pour aller manger une glace de l’autre côté. Et ils en oublient que le nombre de places sur leur bateau est limité…»

 

Par intérêt pour la plongée

La police du lac fribourgeoise compte huit membres. Première condition pour en faire partie: être plongeur aguerri. Les gendarmes qui souhaitent adhérer à la formation doivent d’abord passer des tests d’aptitudes et des tests physiques. Puisque ce sont eux qui sont chargés de toutes les interventions en plongée qui se déroulent dans le canton.
«Et, tous les jeudis, été comme hiver, qu’on soit de service ou en congé, on s’entraîne», explique Florian Vial. Pas question de perdre les bons réflexes. D’autant que lors des interventions, les conditions sont généralement «plutôt extrêmes». La formation est assurée par trois moniteurs membres de la brigade. «On doit maîtriser la plongée avec d’autres mélanges de gaz que l’air comprimé, ajoute Alexandre Oberson. On apprend à faire ces mélanges.» La police est indépendante au niveau de la plongée,
puisqu’elle dispose de son propre compresseur, dans ses murs de Granges-Paccot.
Une fois passées les épreuves d’admission, les gendarmes doivent encore obtenir leur permis de bateau. La police du lac dispose en effet de quatre embarcations différentes. La plus grande, une vedette dotée de gyrophares et de tout le toutim, reste amarrée à Portalban. Les trois autres, de dimension et puissance différentes, sont stationnées à la centrale de Granges-Paccot.
Reste ensuite à apprendre la législation relative aux lacs. Ce qui n’est pas une sinécure puisque chacun des quatre lacs sous leur surveillance dispose d’une réglementation différente. Les gendarmes se relaient ensuite durant les mois d’été pour assurer la sécurité des eaux fribourgeoise, à raison d’un mois chacun. Les patrouilles se font en alternance sur les quatre lacs. Des rondes nocturnes sont également au programme, y compris sur les lacs de la Gruyère et de Schiffenen. Et la police est présente lors de toutes les manifestations.

Quelques règles

Même s’il est plutôt petit, les règles de navigation n’en demeurent pas moins strictes sur le lac de la Gruyère. Ainsi, tous les bateaux à moteur doivent être immatriculés, y compris les embarcations de type zodiac. Les barques à rames et les canoës, eux, sont exemptés pour autant qu’ils ne dépassent pas deux mètres cinquante de long.
La puissance maximale des moteurs autorisée sur le lac de la Gruyère s’élève à huit chevaux. Et pour éviter que les embarcations les plus légères n’atteignent une vitesse trop élevée, celle-ci est limitée à 10 km/h. Selon leur conception, les embarcations peuvent transporter un nombre limité de passagers, qui figure sur le permis de circulation. Pour des raisons de sécurité, on doit trouver à bord du bateau autant de gilets de sauvetage qu’il y a de passagers. Les enfants doivent disposer de gilets particuliers, adaptés à leur taille et comportant un col spécial qui leur maintient la tête hors de l’eau. Toujours pour des raisons de sécurité, chaque bateau doit être doté d’une écope et d’un éclairage pour la nuit.
Au total, 770 embarcations sont immatriculées sur le lac de la Gruyère. Une partie dispose de place de stationnement dans les ports de Pont-en-Ogoz ou de La Roche. D’autres possèdent des autorisations de s’amarrer à des bouées, à Gumefens ou à Morlon, par exemple, ou à stationner au bord de l’eau. Dans le canton, près de 400 bateaux sont encore immatriculés à domicile. Ce qui implique que leur propriétaire doit les sortir à chaque fois du lac, faute de quoi il entre dans l’illégalité.

 

Sophie Roulin
25 juillet 2006

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