COMMENTAIRE

Tetra Pak licencie

La Glâne sinistrée

Séisme en plein été indien glânois: Tetra Pak, le fleuron industriel de Romont, ferme partiellement son unité de production, supprimant d’ici à fin 2006, 131 postes de travail sur 241. Retraite anticipée pour les uns, plan social et mesures d’accompagnement pour les autres: air bien connu.
Economique, la catastrophe reste toutefois d’abord humaine. Les futurs licenciés ont le sentiment que c’est la «famille» qui les éjecte, témoigne le préfet Jean-Claude Cornu. Car on touche à la «génération» Tetra Pak, comme il existe une génération PAA (Parc automobile de l’armée), elle aussi plus que menacée…
Tetra Pak a pris racine en 1976. A une période charnière de la mutation d’une société qui a vu le petit peuple de l’agriculture se tourner avec confiance vers celui, qu’elle croyait béton, de l’industrie.
A une époque où l’on pouvait croire à une sorte d’éternité de ce qui apparaît aujourd’hui, à l’aune de la mondialisation, comme un mirage économique.
On peut tempêter contre ces entreprises devenues des mastodontes. Contre la volatilité d’une économie aux centres décisionnels éloignés des lieux de production. Le syndicaliste Armand Jaquier qualifie cette économie-là «d’Etat dans l’Etat», «d’Etat dans le monde». Une sorte de «culture hors sol» qui ne s’encombre pas de sentiments. De savoir que Tetra Pak exploite, à Dijon (France), une usine qui pourrait absorber toute la production romontoise fait froid dans le dos.
Tetra Pak Romont a-t-il loupé un virage économique? Le conseiller d’Etat Michel Pittet, directeur de l’Economie et de l’Emploi ne le pense pas: 80% de la production romontoise sont destinés à l’étranger et l’évolution de l’économie mondiale a atteint une telle surcapacité, la concurrence est devenue si féroce que le séisme était quasiment programmé. Tetra Pak persiste néanmoins à faire confiance à Romont et aux investissements consentis pour développer ses produits. L’usine aurait pu fermer. Le pire a donc été évité. Jusqu’à quand? Romont et la Glâne sont sinistrés. La balle est dans le camp de l’Etat et de ses partenaires. Dès demain, ils se réunissent. Pour réfléchir à des stratégies qui redonneraient ses chances à la région. Espérons que ce ne soit pas qu’un vœu pieux…

Marie-Paule Angel
13 octobre 2005

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