Près de 100%
de croissance en cent ans. La démographie fribourgeoise se porte
bien, merci pour elle. Si bien que le canton se pose en champion suisse
de la croissance annuelle. Il abritera bientôt 250000 âmes,
contre 128000 au début du XXe siècle. Et selon un scénario
de lOffice fédéral de la statistique, la population
continuera de croître ces prochaines décennies. Les projections
indiquent que Fribourg pourrait ainsi compter quelque 292000 habitants
en 2040.
Si, en un siècle, les trois districts du Sud ont tous gagné
en population, lexplosion démographique na vraiment
débuté quà laube des années
1980, au lendemain de la réalisation de lautouroute A12.
La comparaison entre les recensements fédéraux de 1980
et de 2000 est particulièrement frappante: le canton enregistre
larrivée de plus de 56000 nouveaux habitants, dont 18000
dans le Sud.
Durant cette période, toutes les communes ont recueilli de nouvelles
âmes. Parfois très peu, à limage de Cerniat
(+1,2%), parfois beaucoup plus. Bossonnens est ainsi passé, de
1980 à 2000, de 513 à 1041 âmes (+103%). La Veveyse
en général a largement profité de ces deux décennies,
qui ont vu la population du district progresser de 45%. Et ce nest
pas fini: au 31 décembre 2004, selon les indications obtenues
auprès des différents secrétariats communaux, la
Veveyse abritait déjà 1000 habitants de plus que lors
du recensement de 2000.
La Glâne
se repeuple
La Gruyère na pour sa part vu sa population croître
«que» de 36,5% entre 1980 et 2000. Le chef-lieu et ses proches
voisines ont le mieux tiré leur épingle du jeu. En passant
de 532 à 933 habitants, Le Pâquier a par exemple connu
une progression de 75%. Durant ces vingt années, 3550 nouveaux
habitants sont par ailleurs venus sinstaller à Bulle, représentant
un gain de population de 47%. Mais le développement de la ville
est spectaculaire à léchelle du siècle: en
1900, elle comptait 3330 habitants; elle en abrite aujourdhui
plus de 12500 (+275%)
A titre de comparaison, Châtel-Saint-Denis
et Romont nont respectivement progressé «que»
de 92% et 89%.
Les deux décennies courant de 1980 à 2000 sonnent lheure
de la renaissance pour la Glâne, qui a davantage souffert que
les districts voisins de lexode rural. Entre 1950 et 1980, elle
perdait ainsi 13% de sa population, quand la Gruyère et la Veveyse,
péniblement, progressaient de respectivement 5% et 1%. Mais la
Glâne a repris du poil de la bête et se repeuple gentiment.
Elle a ainsi gagné un tiers dhabitants entre les recensements
de 1980 et 2000. Si lon y regarde de plus près, on constate
cependant quà ce jour, le district na vu sa population
croître que de 30% par rapport à 1900 (Gruyère:
+78%; Veveyse: +63%).
Les communes glânoises ne sont évidemment pas toutes logées
à la même enseigne. Et certaines ont elles aussi connu
des progressions spectaculaires. Celle dUrsy par exemple. Au début
du XXe siècle, les villages qui la composent aujourdhui
Ursy, Bionnens, Mossel et Vauderens recensaient 707 habitants.
Sils nétaient encore que 821 en 1980, on en compte
désormais plus de 1550. A limage dAttalens, Granges
ou Bossonnens, Ursy tire clairement profit de larc lémanique
tout proche, où le foncier reste nettement moins avantageux quen
terres fribourgeoises.
Séquelles
de lexode rural
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Certaines
communes nont pas encore digéré lexode
rural qui a frappé le canton des années 1940 à
1960 (voire plus tard dans certains districts). Cette période
marque le transfert des activités agricoles et industrielles
vers les services. Une métamorphose de léconomie
qui va vider certains villages de ses habitants, qui rejoignent
les villes. Au 31 décembre 2004, plusieurs navaient
pas encore égalé le chiffre du recensement de
1900.
En Gruyère, avec ses 336 habitants, Cerniat reste loin
des 713 du début du XXe siècle (112%). Il
manque également quelque 300 âmes à Haut-Intyamon
1418 résidants pour revenir au total de
1900. La germanophone Bellegarde remonte progressivement la
pente: elle abritait 709 individus en décembre 2004,
contre 825 un siècle plus tôt. Quant à la
commune dHauteville, qui sest retrouvée à
312 habitants en 1980, elle aura bientôt comblé
le déficit: ne lui manque plus quune trentaine
dhabitants pour retrouver les 533 du début du XXe
siècle.
Dans la Glâne qui, on la dit, a fortement
souffert de cet exode rural les pertes sont pratiquement
compensées partout: à Ecublens (265 en 2004 contre
277 en 1900); à Grangettes (149 contre 186) et à
Rue (1076 contre 1082). Seul Le Châtelard 344 habitants
aujourdhui a besoin dune centaine dâmes
supplémentaires pour retrouver le chiffre de la population
résidante de 1900.
Une centaine de personnes en sus, cest également
ce dont a besoin La Verrerie (Le Crêt, Grattavache et
Progens) pour égaler les 1054 habitants décomptées
au tournant du XXe siècle. Autre commune veveysanne à
avoir souffert plus que les autres de lexode rural, St-Martin
comptait, en décembre 2004, huit résidants de
moins quen 1900.
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Fribourgeois
plus mobiles
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Fribourg
doit la croissance démographique enregistrée ces
dernières décennies à deux éléments
essentiels. Le premier est lié à lamélioration
des voies de communication et à louverture de lautoroute
A12. Le deuxième en découle directement: les résidants
du canton jouissent depuis quelques années dune
mobilité accrue. Un chiffre: en 1978, le parc automobile
fribourgeois comptait 57048 voitures de tourisme. Au 30 septembre
2004, on en recensait 145619 (+155%)
«Aujourdhui,
on multiplie les kilomètres tout en gagnant du temps»,
schématise Jean Ruegg, professeur de géographie
humaine à lUniversité de Fribourg.
Avant les années 1980, le choix du lieu de résidence
était généralement déterminé
par la proximité du lieu de travail. Ce nest plus
forcément le cas: «Il devient de plus en plus difficile
et rare, lorsque lon est dans la vie active, de mener
toute sa carrière dans le même emploi, sur le même
lieu», explique Jean Ruegg. Dautres critères
de sélection la beauté dun paysage
ou la proximité familiale par exemple viennent
donc sajouter à celui du travail. On fonctionnera
plus volontiers au coup de cur aujourdhui quil
y a trente ans.
Linconnue
énergétique
Mais le système dhypermobilité dans
lequel nous évoluons suppose un faible coût de
lénergie, met en garde Jean Ruegg. «Quel
sera le prix du carburant dans vingt ans? On nen sait
rien, mais ce sera déterminant.» Sil venait
à doubler, bonjour la facture de la mobilité!
Une perspective que Jean Ruegg appréhende non sans craintes.
«Si nous affrontons une augmentation massive du prix de
lénergie, ce ne sont pas ceux qui ont le plus de
moyens qui vont en pâtir.» Il devine que les personnes
à revenu plus faible seront obligées de prendre
en considération les coûts de leurs déplacements
et seront forcées de se rapprocher de leur lieu de travail,
généralement situé en zone urbaine. Chacun
ne pourra donc plus habiter là où il le désire.
«On peut donc penser quà lavenir, la
tendance sera à la poursuite de lurbanisation du
plateau et à un certain dépeuplement des régions
périphériques qui ne sont pas drainées
par lautoroute ou par des transports efficaces.»
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