FRIBOURG
Fri-Son
Les
gardiennes du temple
Programmation,
administration et comptabilité: autant de postes clés occupés
à Fri-Son par des femmes. Julia Crottet, 34 ans, Aline Favre, 30
ans, et Maude Montani, 24 ans, sont les gardiennes de «lesprit»
du temple du rock, de la pop et des musiques alternatives. Fri-Son reste
la référence du genre en Suisse.
Maude Montani, Julia
Crottet et Aline Favre: «Maintenir lesprit Fri-Son»
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Le
rock et les musiques alternatives ont trouvé leur sanctuaire
à Fri-Son. Depuis vingt-deux ans, le club de la route de la Fonderie
13, à Fribourg, sest imposé loin à la ronde
comme la référence dans lorganisation de concerts.
Gardiennes du temple, de sa tradition mais aussi de son renouvellement,
trois femmes occupent aujourdhui des postes clés au sein
de lassociation.
Julia Crottet, la programmatrice, Aline Favre, ladministratrice,
et Maude Montani, la comptable, gèrent un budget dun peu
plus dun million de francs et planifient quelque 150 manifestations
chaque année. Elles jettent aujourdhui un regard plein
de fraîcheur sur le club et les tribus qui le fréquentent.
Trois femmes à la tête de Fri-Son, laffaire nest
pas banale. Seul le poste de lintendance leur échappe encore.
Mais pas de quoi fouetter un chat, pour les pétillantes jeunes
filles. Bien sûr, une certaine fierté dêtre
femmes et doccuper des postes à responsabilité transpire
dans leurs propos. Mais volontairement, elles ne vont pas exagérer
limpact dun choix totalement assumé par le comité
de lassociation. Elles rêvent même que la question
est-ce important pour vous dêtre trois femmes responsables
à Fri-Son? ne soit un jour plus posée.
«Les femmes qui occupent des places importantes, cest lavenir
de notre société. La présence féminine à
Fri-Son ne devrait plus être une curiosité, mais un phénomène
normal et accepté», revendique Julia Crottet. Dailleurs,
de plus en plus de filles sintéresseraient aujourdhui
aux tâches techniques de la gestion du club. Il y a peu, le domaine
était encore largement dominé par les hommes. Mais les
mentalités évoluent. Aline Favre indique dailleurs
que «tout le monde respecte notre travail». Et dajouter
sur un ton pince-sans-rire: «Fri-Son na dailleurs
pas fait faillite depuis que nous sommes là!»
Et cest vrai que Fri-Son se porte bien. Le club a pu survivre
malgré le creux de la vague de la fin des années 1990.
Mieux, il a su maintenir un cap résolument tourné vers
la musique alternative, quelle soit rock ou électronique.
La déferlante techno na rien pu faire contre le savoir-faire
de lassociation. Là où bon nombre de clubs romands
périclitaient, minés par des conflits internes ou par
des gestions financières désastreuses, Fri-Son continuait
son bonhomme de chemin grâce à une gestion prudente.
Maîtriser
les finances
«Il ny a jamais eu dexplosion de la masse salariale
comme cela sest vu dans dautres salles de Suisse. Le mot
dordre a toujours été le même: adapter les
dépenses aux recettes», explique Maude Montani. La méthode
Fri-Son, cest ainsi un contrôle bimensuel des coûts,
un autofinancement à hauteur de 75% et la mise en place de budgets
provisionnels très stricts.
Mais au-delà de la maîtrise financière, le choix
culturel reste évidemment capital pour la bonne marche de la
salle de concerts. Et la mémoire de Fri-Son parle pour lui. Des
noms mythiques lui sont associés à jamais: Moby, les Beasty
Boys, Noir Désir, Massive Attack, Sonic Youth ou encore Nirvana.
Mais il y a aussi ces groupes méconnus qui ont foulé la
scène où se sont produites toutes ces stars. Julia Crottet
résume cette philosophie perpétuée depuis des années
à Fri-Son: «Lalchimie nest pas simple à
trouver. Il faut à la fois proposer des groupes qui attirent
du monde, tout en ne négligeant pas lavant-gardisme et
les découvertes. Léquilibre entre ces deux tendances
doit être atteint sur une saison.»
Louverture à différents types de musique est ainsi
essentielle. «Grâce à une initiative unique en Suisse,
lassociation a dailleurs mis sur pied un programme de formation
pour ses membres. Matière principale: comment bien gérer
son club. La transmission du savoir notamment pour la fonction
de programmateur sest au fil des ans imposée comme
un élément clé pour assurer la pérennité
du projet.
La
menace vient de Zurich
Reste que la concurrence a repris de la vigueur ces derniers mois.
Après la mort de la Dolce Vita à Lausanne, le Romandie
a repris le flambeau de son illustre ancêtre. Genève, Berne
et Zurich possèdent également des salles compétitives.
Lorsque lon sait quenviron les deux tiers de la clientèle
de Fri-Son sont extérieurs au canton, on comprend mieux limportance
de mettre sur pied une programmation capable de déplacer les
foules. Pour Julia Crottet, «la menace vient de certains clubs
zurichois, qui font de la surenchère sur le marché des
groupes. On ne peut parfois plus saligner sur les cachets proposés.
Cette tendance est nouvelle et inquiétante.»
Cest donc sur lesprit de famille que compte Fri-Son pour
poursuivre sa route. Aline Favre en est convaincue: «On vient
dans ce club autant pour sa programmation que pour les gens quon
y rencontre. Fri-Son est une grande tribu que lon ne quitte pas
facilement. Je crois même que lon ne sen lasse jamais.
Et pour ceux qui font Fri-Son, limportant est de maintenir cette
ouverture desprit et cette atmosphère.»
Les
trois femmes de Fri-Son
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Maude
Montani, 24 ans, comptable. Maude Montoni est la benjamine du
trio. Celle qui se dit fan de la chanteuse Shakira a grandi
dans le Mississippi. Dès son arrivée en Suisse
à la fin des années 1990, elle fréquente
Fri-Son. Elle sengage alors dans le club en participant
à la cellule «décoration». Puis elle
travaille au bar. Economiste de formation, avec une spécialisation
en économie politique, Maude Montani est contactée
au début 2002 par le comptable de Fri-Son de lépoque,
qui désire passer la main. Elle postule et est engagée
par lassociation. Depuis, elle poursuit le travail tout
en rigueur de son prédécesseur.
Julia Crottet, 34 ans, programmatrice. Julia Crottet, connaît
Fri-Son comme sa poche. Elle a suivi de près ses vingt-deux
ans dexistence et les quelque 2000 manifestations organisées
par lassociation. Longtemps intégrée à
plusieurs mouvements artistiques fribourgeois,
cette couturière de formation et organisatrice de happenings
fréquente en effet le club depuis ses débuts.
Elle y a travaillé au bar, avant dorganiser pendant
six ans les soirées «olive». De fil en aiguille,
et après quelques pauses, elle intègre la cellule
programmation, avant den prendre la direction dans le
courant de lannée 2003.
Aline Favre, 30 ans, administratrice. La dernière venue
a déjà bien roulé sa bosse. Après
avoir étudié langlais et lhistoire
de lart à luniversité, Aline Favre
senvole pour New York, où elle travaille dans une
galerie dart et au Swiss Institute. Puis départ
pour trois mois en Afrique du Sud. Dans la ville du Cap, elle
intègre le bureau de Pro Helvetia, où elle soccupe
notamment des échanges culturels. Mais Fri-Son nest
pas une terra incognita lorsquelle apprend que le club
cherche un administrateur. Aline Favre a fréquenté
les lieux comme cliente et y a travaillé au bar, avant
de devenir son administratrice.
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