FRIBOURG Beat Vonlanthen

Cent jours vécus en équipe

Du jamais vu dans le canton, en tout cas depuis longtemps! Pour ses cent jours au Conseil d’Etat, hier, Beat Vonlanthen a mis en avant ses chefs de service, parce qu’il entend les impliquer davantage. Adepte du travail d’équipe, le ministre des travaux publics se dit «à l’aise comme un poisson dans l’eau». Ses objectifs sont ambitieux.


En place au Conseil d’Etat depuis le 1er juillet, Beat Vonlanthen (à droite) partage la vedette avec ses cadres

 

P¥Beat Vonlanthen, au Gouvernement depuis le 1er juillet, n’est pas homme à tirer la couverture à lui. Pour marquer ses cent jours au Conseil d’Etat, «extraordinairement intéressants et fascinants», le nouvel élu s’est entouré hier de ses principaux cadres. Et il a pris soin de les présenter un à un. Claude Morzier, ingénieur cantonal, Charles-Henri Lang, architecte cantonal, André Piller, du Service des autoroutes, Marius Achermann, de la protection de la nature, et leurs collègues ont ensuite pris la parole à tour de rôle pour égrener les principaux dossiers de la Direction de l’aménagement, de l’environnement et des constructions (DAEC).
C’est que Beat Vonlanthen ne jure que par le dialogue et le travail en équipe (lire interview). Le style a donc changé par rapport à son prédécesseur: «Oui. M. Lässer est une personne plus discrète, un homme de cabinet, tandis que M. Vonlanthen est presque hyperactif», compare le secrétaire général Bernard Pochon. Enthousiaste, dynamique, ambitieux: le nouveau chef n’a pas tardé à communiquer ses convictions, «son élan et son plaisir» à ses quelque 450 collaborateurs, qu’il a pour ainsi dire tous rencontrés personnellement.

Objectif Poya!
Le démocrate-chrétien de 47 ans avait convié la presse à l’auberge de Grandfey, voisine de la ligne CFF. Il faut y voir un message subliminal, car l’homme a dû sauter dans un train gouvernemental déjà en marche! «J’ai été très bien reçu. Le climat est bon au Conseil d’Etat où des discussions animées ont lieu et des solutions praticables sont recherchées. Il n’y a pas de combats de tranchées sur fond idéologique.»
Choisir Grandfey, c’est aussi et surtout un clin d’œil symbolique à son principal défi: concrétiser le pont de la Poya attendu depuis des décennies pour désengorger le centre-ville de Fribourg (quartier du Bourg). «Je vouerai toutes mes forces à la réalisation la plus rapide possible de ce projet important.» Le magistrat singinois a la ferme intention de soumettre cet objet au vote des Fribourgeois en juin 2006, soit avant la fin de la législature.
Il exercera pour cela «une pression spéciale». Quant au financement de 100 millions de francs environ, il s’agira de s’opposer au déclassement, envisagé par Berne, de cette route principale suisse. Sinon, adieu les millions promis par l’Office fédéral des routes! Il faudra aussi tenter de décrocher une contribution fédérale au titre de projet d’agglomération.
Autres dossiers empoignés, toujours avec les chefs de service concernés: la réalisation «sans retard» de la route de contournement de Bulle (voir La Gruyère du 30 septembre), la recherche d’une place de stationnement destinée aux gens du voyage et la question des chalets de la rive sud du lac de Neuchâtel. Parmi les projets, on mentionnera la révision totale de la Loi sur l’aménagement du territoire et les constructions, la rédaction d’une nouvelle Loi sur la protection des eaux ainsi que l’évitement de Guin.

Au four et au moulin
A l’évidence, le team Vonlanthen a du pain sur la planche: il devra défendre tant les infrastructures cantonales qu’une politique de développement responsable, améliorer la politique immobilière du canton (acquérir plutôt que louer), freiner la disparition des terrains agricoles, revoir les normes «trop contraignantes» des constructions hors des zones à bâtir qui risquent de faire du canton un «grand Ballenberg». Sans oublier que l’entretien des routes pose problème: «Environ sept millions par an ne suffisent pas à garantir un entretien durable du réseau.»
Mais attention, le nouveau chef des travaux publics n’entend pas laisser une trace dans l’histoire fribourgeoise comme étant un «ministre des annonces». Conscient de la difficulté de la tâche, il pré-fère fixer des «objectifs ambitieux» et s’y attaquer «avec une volonté farouche». Ultime exemple du style Vonlanthen: «Je veux que ma Direction se signale par sa proximité avec le citoyen et la grande qualité de son travail.»
Voilà tout le monde prévenu au sein d’une Direction qui pèse 5% des fonctionnaires du canton, près de 7% des dépenses de l’Etat et 43% des investissements fribourgeois. La DAEC, ce sont aussi plus de 25 corps de métier, répartis en 40% d’administratif et technique contre 60% de personnel ouvrier.

Un nouvel urbaniste
Hier également, Beat Vonlanthen a présenté publiquement le nouvel urbaniste cantonal Hans Flückiger, qui remplace en qualité de chef du Service de l’aménagement et des constructions le démissionnaire Christian Wiesmann parti travailler pour le compte de la ville de Berne. Il s’agit d’une personnalité déjà connue dans le canton, puisque Hans Flückiger a dirigé l’arteplage de Morat durant expo.02. Agé de 54 ans, marié et père de deux enfants, cet architecte de formation, domicilié à Brügg (BE) près de Bienne, entrera en fonction le 1er novembre. Il a été choisi parmi 15 candidats.

«Non, je ne regrette rien du tout»

La Berne fédérale vous manque-t-elle? Ne regrettez-vous pas votre poste de haut fonctionnaire, les poignées de mains avec le président chinois ou le prince Charles?
Beat Vonlanthen. J’aime beaucoup mon nouveau travail, je le trouve passionnant, même si les contacts avec nos partenaires extérieurs exigent beaucoup de temps. Vu que j’ai commencé ce marathon comme un sprinter, je n’ai presque plus de temps libre. Mais je ne regrette rien du tout, du moins pour l’instant. C’est un bonheur de discuter avec un cantonnier ou avec quelqu’un qui veut construire un studio hors d’une zone à bâtir pour accueillir un parent handicapé. C’est plus terre à terre, mais c’est aussi important et satisfaisant.

– D’où vient votre goût pour le travail en équipe?
C’est une caractéristique personnelle. Je pars de l’idée qu’on peut faire du travail de qualité uniquement en s’appuyant sur les compétences de ses collaborateurs. Je ne peux pas tout faire seul et je dois avoir le soutien des collaborateurs. C’est aussi une question de motivation pour eux. J’ai par exemple remarqué que les chefs de service, qui faisaient très bien leur travail, n’étaient pas du tout impliqués dans la préparation des séances du Conseil d’Etat. J’ai changé cela: ils doivent me faire des remarques, même pour les dossiers des autres Directions qui les concernent.

– Avez-vous senti des réticences au changement?
Je les ai perturbés un peu et j’ai donc constaté un choc de culture. Mais cela a été bien reçu et il en ressort du positif. J’ai une relation amicale avec mes chefs de service, on se tutoie. Je suis comme ça, je ne peux simplement pas faire autrement. Si ce sont eux les spécialistes, c’est tout de même moi qui donne la direction à suivre. Je pense aussi qu’ils ont un rôle important à jouer au niveau de l’information envers le grand public, raison pour laquelle j’ai tenu à ce qu’ils m’accompagnent en cette circonstance.

– Et comment les choses se passent-elles avec Marius Achermann, qui visait aussi votre poste?
Tout se passe pour le mieux. C’est une personnalité très compétente et pragmatique qui collabore d’une manière impeccable avec moi. On a de très bons contacts, ce qui ne me surprend pas, car j’ai appris à le connaître durant la campagne électorale.

– A voir l’énergie que vous déployez et vos objectifs ambitieux, on vous imagine mal quitter les travaux publics déjà dans deux ans… La Direction de l’économie, qui sera libérée en 2006 par Michel Pittet, vous intéresse-t-elle encore?
La Direction de l’aménagement, de l’environnement et des constructions est extrêmement intéressante et importante pour le développement économique du canton. Je pourrais fort bien m’imaginer continuer après les élections cantonales de 2006 et je trouverais même dommage d’arrêter si vite après les efforts consentis pour me familiariser avec ces sujets. Mais il ne faut jamais dire jamais… Il faudra voir si je suis réélu et tenir compte de la composition du prochain Gouvernement. Pour l’instant, je suis à l’aise comme un poisson dans l’eau.

 

 

Sébastien Julan
9 octobre 2004

Une I Editorial I Veveyse/Glâne I Fribourg I Sports

Droits de reproduction et de diffusion réservés © La Gruyère 2003 – Usage strictement personnel