GRUYÈRE Florian Bassenne

«Inoubliable Garde suisse»

A l’occasion du 500e anniversaire de la Garde suisse pontificale ce dimanche, Florian Bassenne ouvre sa boîte à souvenirs. Garde suisse entre juin 1995 et août 1997, le Gruérien est intarissable lorsqu’il évoque la plus petite et la plus vieille armée du monde.


Entre épée et photos souvenirs, le Gruérien Florian Bassenne
se dit marqué à vie par ses deux ans passés au service du pape

 

«Moi, hallebardier Bassenne, je jure d’observer loyalement et de bonne foi, tout ce qui vient de m’être lu, aussi vrai que Dieu et ses saints m’assistent.» Ces paroles, prononcées le 6 mai 1996 dans la cour San Damaso du palais apostolique, Florian Bassenne ne les oubliera jamais. Main droite levée en signe de serment, main gauche refermée sur la bannière de la Garde suisse, morion argenté orné d’un panache rouge et cuirasse d’époque, le hallebardier a fière allure dans son uniforme de gala.
«J’étais sur un nuage, se souvient Florian Bassenne en ouvrant un épais album entièrement consacré à cette journée du giuramento. Comme le jour de mon mariage, mais sans les sentiments…» Agé de 25 ans à l’époque, le Gruérien laissait derrière lui sa compagne, sa famille et son emploi de dessinateur géomètre pour veiller sur le Saint Père et assurer la sécurité de la cité du Vatican. Il ne s’imaginait pas encore devenir informaticien – après une tentative dans le social et un passage par une entreprise de sécurité – ni rencontrer Anita.

Raisons secrètes
Mais pourquoi choisit-on l’existence militaire, quasi monastique, de la Garde pontificale? «C’est mon jardin secret, sourit l’intéressé. Ni ma famille, ni mon épouse ne connaissent les raisons exactes qui m’ont conduit au Vatican peu après avoir payé mes galons d’officier à l’armée.» S’il est discret quant à ses motivations, Florian Bassenne ne se fait pas prier pour ouvrir son carton à souvenirs.
Près d’un millier de clichés rangés dans des enveloppes aux libellés évocateurs – «assermentation», «visite officielle de Jacques Chirac» ou encore «fiesta avant le départ de collègues» – côtoient quatre chapelets offerts de la main même du pape. «J’ai eu le privilège d’accompagner Jean Paul II durant cinq semaines à l’Angélus du dimanche lors de mon dernier service à Castelgandolfo. Comme il adorait parler français, il m’adressait facilement un petit mot. Il se souvenait par exemple de mon père qui avait réalisé la bannière lors de sa visite à Fribourg en 1984.»

Pour 750000 lires
Farfouillant dans la boite, Florian en extirpe un autocollant de la radio vaticane, un autre de la légion d’honneur – «une rencontre qui s’est transformée en amitié» – une collection de timbres à l’effigie de la Garde suisse dénichés chez un antiquaire et une fiche de paie. «On touchait 750000 lires au début, puis un million, ce qui correspond à un salaire mensuel de 700 francs, puis de 1200 francs environ.»
Autant dire que ce n’est pas l’appât du gain qui a poussé ce passionné d’armes et de tir à «s’infliger une certaine discipline», comme il dit. Ce qu’il retire de ces deux ans? La fierté d’être la carte de visite du Vatican et des Suisses à l’étranger, la possibilité de se plonger dans une culture nouvelle et surtout l’amitié qui se tisse entre collègues.
En témoigne une série de photos moins nettes et moins bien cadrées que celles d’Arturo Mari, le photographe personnel du pape: une chambre spartiate, un caquelon vide et une équipe de Romands bien allumés. Parmi eux, Cédric Tornay, tout sourire. «On s’entendait comme larrons en foire, commente Florian Bassenne. J’étais à l’armée lorsque le drame a éclaté et je n’en est rien su. Je suis tombé des nues lorsqu’un journaliste d’Il Messagero m’a contacté le 5 mai au matin pour me demander ce que je pensais de l’assassinat du commandant de la Garde suisse Alois Estermann et de son épouse par le vice-caporal Tornay.»
Pudique, Florian Bassenne préfère ne pas s’appesantir sur une tragédie qu’il ne s’explique toujours pas. «C’est vrai que cette vie de garde pontifical n’était pas facile avec ses heures de sentinelles et ses horaires irréguliers. Mais elle m’a permis de m’arrêter, de prendre le temps de réfléchir à ma vie. Ma foi en est sortie grandie.»

Fribourg, cathédrale Saint-Nicolas, ce dimanche 22 janvier, 10 h, célébration eucharistique présidée par le cardinal suisse Georges-Marie Cottier à l’occasion du 500e anniversaire de la Garde suisse pontificale. La cérémonie débutera dès 9 h 20 par un cortège au départ de l’Université de Fribourg.

Valeur et fidélité

L’ouvrage publié pour le 500e anniversaire de la Garde suisse pontificale, richement illustré, retrace son histoire sur 250 pages. Le 21 juin 1505, le pape Jules II s’adresse à la Confédération suisse afin d’obtenir une garde pour la protection de sa personne et du palais apostolique. A la fin de la même année, les 150 premiers gardes prennent le chemin de Rome et entrent en service le 22 janvier 1506. Lors du sac de Rome le 6 mai 1527, 147 périssent en défendant le pape Clément VII. En mémoire de cet événement, la fête annuelle au cours de laquelle les nouveaux gardes prêtent serment a toujours lieu le 6 mai.
L’ouvrage est composé se divise en trois parties. «La Garde et son histoire» évoque les événements clés depuis sa création. «La Garde et son environnement» présente les uniformes et les drapeaux, les églises et les quartiers de la Garde et décrit le soutien dont elle bénéfice en Suisse. La «Garde au quotidien» aborde la vie quotidienne, la formation et les devoirs, les motifs d’entrée ou le jour de l’assermentation. Un appendice fourni, avec le nom des commandants et les listes des effectifs depuis 1900, complète l’ouvrage, qui prend notamment position sur l’affaire du meurtre survenu en 1998.

Robert Walpen, La Garde suisse pontificale, Editions Slatkine


Claire-Lyse Donnet
21 janvier 2005

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