Demain sera un grand jour pour vous puisque vous accéderez officiellement
au poste de doyen de la Glâne-Veveyse. Votre sentiment face à
cette nomination?
Pascal Desthieux. Jai été touché par cette
marque de confiance de Mgr Bernard Genoud et de mes collègues,
consultés au préalable.
A 35 ans, je suis le plus jeune prêtre du décanat! Javouerai
aussi que tant de félicitations de la part des gens mont
surpris. Il est vrai quautrefois cette charge revêtait un
aspect assez solennel. Le doyen vérifiait notamment que le catéchisme
était enseigné de la bonne façon. Il y avait même
un examen pour les écoliers
Mais maintenant, les choses
ont changé.
Alors
quattend-on dun doyen aujourdhui?
Trois choses, concrètement. Tout dabord, il doit avoir
le souci des agents pastoraux prêtres, diacres et laïcs,
en activité ou à la retraite qui se trouvent sous
sa responsabilité. Une quinzaine de personnes dans mon cas. En
clair, le doyen veille à leur bien-être tant psychologique
que matériel et coordonne le soutien à leur apporter en
cas de besoin. Pour ma part, jentends rester dans la simplicité
en organisant de temps à autre des réunions ou des sorties
pour se retrouver. Autre mission, celle de conciliateur en cas de conflits
au sein des unités pastorales du décanat. Et finalement,
il participe à la conférence des doyens qui se tient une
fois par mois. Nous collaborons en tant que conseillers du vicaire épiscopal.
Le tout en continuant à assumer nos fonctions de curé.
Vous évoquez
les unités pastorales, des structures plus grandes que les secteurs
paroissiaux quelles sont en train de remplacer. A quel prix sont-elles
gérables?
Les fidèles devront faire des concessions, notamment en dépassant
le cadre de leur paroisse pour se rendre à la messe. Ou en acceptant
que des laïcs voire des bénévoles qui
font partie des équipes pastorales officient durant certains
types de célébrations. La décision de passer aux
unités pastorales a été motivée par la pénurie
de prêtres, le manque de vocations et la baisse de la pratique
religieuse. Elle na pas été prise de gaieté
de cur. Avant, il y avait un prêtre dans chaque village.
Il connaissait tout le monde et pouvait jouer aux cartes au bistrot
durant laprès-midi, se rendre au souper du chur mixte
et de la fanfare paroissiale
Si lon prend lexemple
de la Veveyse aujourdhui, toutes ses paroisses seront réunies
dès cet automne au sein dune seule unité. Quant
à la Glâne, elle en comptera deux.
Ça
devient un peu lindustrie
Je ne pense pas. Mais cest vrai que ce sera plus difficile dappliquer
la proximité que nous prônons. Même si beaucoup de
fidèles nattendent pas forcément de connaître
le curé personnellement
Pour continuer à fonctionner
au mieux, il a fallu fixer des priorités. Nous concentrons désormais
nos efforts sur la proposition de la foi, notre rôle principal
étant damener vers Dieu. Le catholicisme ne coule plus
de source dans notre société. Dautre part, la nouvelle
structure présente des avantages: la mise en valeur des laïcs,
la responsabilisation des paroisses et leur collaboration, par exemple.
Ou le travail en équipe, qui autorise un partage des responsabilités
selon le charisme de chacun. Le fait dêtre plusieurs prêtres
nous permettra notamment de partir plus facilement en vacances (rires)
A propos,
la charge nest pas trop lourde à supporter pour les curés?
Personnellement, je le vis bien. Il faut dire que je ne suis pas tout
seul. Mais cest vrai quon ne chôme pas. Je métais
amusé à calculer mon nombre dheures de travail hebdomadaires.
En moyenne, entre 70 et 80.
Lemploi
du temps dun cadre supérieur, le salaire en moins
Nous avons quand même été bien augmentés:
ça tend vers les 65000 francs par an, maintenant. Et tout le
monde est logé à la même enseigne: le prêtre
qui débute comme lévêque. Bon, des charges
sont venues sajouter: le loyer, une participation à la
paie de laide de cure, le financement de la retraite, les impôts
(y compris les paroissiaux, bien sûr), etc. Je pourrais éventuellement
sortir de lEglise pour en payer un peu moins, mais je crois que
ça ne passerait pas très bien (rires)
Dautre
part, le célibat nous permet dêtre plus disponible
pour le travail.
Pour en
revenir aux unités pastorales, comment les paroissiens vivent-ils
ce changement? Y a- t-il eu des frictions?
Je nai pas reçu de remarques très négatives
jusquà présent. Les fidèles sont conscients
de la situation et la plupart comprennent quil nest plus
possible den attendre autant quautrefois. Mais il faudra
du temps aux gens pour sy faire, évidemment.
Romont, collégiale,
messe dinstallation dimanche 22 janvier, à 19 h 30
Une
Eglise qui retrouve lhumilité
Quel regard portez-vous sur la situation actuelle de lEglise catholique?
Pascal Desthieux. Je trouve quelle ne
va pas si mal que ça. Chaque jour, je remarque beaucoup de sainteté
chez les gens: ils prient, ils vont à la messe, ils vivent lEvangile
Même des non-pratiquants le font. Cest la preuve que le
message est passé. Par contre, cest vrai que lon
sachemine vers une Eglise plus «pauvre». Mais je crois
que cest purifiant, elle redevient plus humble. Je souhaite ardemment
quon aille vers plus de profondeur.
Votre
avis sur la tendance actuelle au «bricolage» des croyances?
Il faut respecter le choix de chacun. Il y a de bonnes choses ailleurs,
même si tout ne se vaut pas. Toutefois, je pense que le syncrétisme
affadit le message. Et puis une religion, ce nest pas seulement
se servir de concepts qui nous arrangent, mais surtout grandir dans
une relation. Pour cela, une certaine continuité est nécessaire.
Mais le plus important, cest de vivre sa spiritualité à
fond. Je me souviens avoir été impressionné, lors
dun voyage à Jérusalem, par un marchand de glaces
musulman qui avait renoncé à nous servir, car cétait
lheure de sa prière. Un témoignage magnifique.
Etes-vous
favorable à lordination des femmes et au mariage des prêtres?
En ce qui concerne les femmes, je trouve que lon focalise trop
le débat sur leur possible ordination. Il existe dautres
fonctions, dautres services au sein de lEglise. Je respecte
le choix de Rome sur ce point, même si je comprends pleinement
laspiration de certaines femmes à accéder à
la prêtrise. Je ne serais pas choqué si leur ordination
devenait possible. Dailleurs, ce serait dommage de se passer de
forces vives. Mais un tel changement doctrinal entraînerait une
rupture profonde dans la tradition. Ce genre de décisions nest
pas facile à prendre. Quant à lobligation du célibat
des prêtres, jestime à linstar des évêques
suisses qui en ont fait officiellement la demande quil
serait bon dordonner des hommes mariés. Même sil
ne faut pas forcément y voir le remède miracle
Un
catholique chez Calvin
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Né
en 1970 près de Genève dans une famille catholique
pratiquante, Pascal Desthieux se sent très tôt
appelé par Dieu et décide dembrasser la
prêtrise. Après une maturité dans la cité
de Calvin, le séminaire à Fribourg et une année
passée au Congo-Zaïre, il est ordonné prêtre
à Lausanne en 1997. Vicaire à la paroisse Notre-Dame,
il occupe en parallèle le poste de coordinateur du Centre
romand des vocations jusquen 2001. Auparavant, en 1999,
lévêque le nomme vicaire des paroisses dYverdon
et de Grandson. Il arrive ensuite à Romont voilà
cinq ans.
Guitariste, Pascal Desthieux apprécie la chanson française
moderne en général et la musique de Jean-Jacques
Goldman en particulier. Il cultive dautre part un goût
pour la photographie et pratique volontiers le sport. Outre
le ski, la natation ou la marche, le curé franco-suisse
de 35 ans affectionne les sports de raquette: tennis, badminton
ou squash, une activité quil pratique régulièrement
avec le pasteur du chef-lieu glânois.
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