VEVEYSE Pascal Desthieux

Nommé doyen à 35 ans

En place depuis 2001 à Romont, Pascal Desthieux a récemment été nommé au poste de doyen de la Glâne-Veveyse par l’évêque Mgr Bernard Genoud. Une fonction que le prêtre de 35 ans entend vivre comme un service. Son installation a lieu ce dimanche. Entretien.

Pascal Desthieux: «Nous allons concentrer nos efforts sur la proposition de la foi»

 

– Demain sera un grand jour pour vous puisque vous accéderez officiellement au poste de doyen de la Glâne-Veveyse. Votre sentiment face à cette nomination?
Pascal Desthieux. J’ai été touché par cette marque de confiance de Mgr Bernard Genoud et de mes collègues, consultés au préalable.
A 35 ans, je suis le plus jeune prêtre du décanat! J’avouerai aussi que tant de félicitations de la part des gens m’ont surpris. Il est vrai qu’autrefois cette charge revêtait un aspect assez solennel. Le doyen vérifiait notamment que le catéchisme était enseigné de la bonne façon. Il y avait même un examen pour les écoliers… Mais maintenant, les choses ont changé.

– Alors qu’attend-on d’un doyen aujourd’hui?
Trois choses, concrètement. Tout d’abord, il doit avoir le souci des agents pastoraux – prêtres, diacres et laïcs, en activité ou à la retraite – qui se trouvent sous sa responsabilité. Une quinzaine de personnes dans mon cas. En clair, le doyen veille à leur bien-être tant psychologique que matériel et coordonne le soutien à leur apporter en cas de besoin. Pour ma part, j’entends rester dans la simplicité en organisant de temps à autre des réunions ou des sorties pour se retrouver. Autre mission, celle de conciliateur en cas de conflits au sein des unités pastorales du décanat. Et finalement, il participe à la conférence des doyens qui se tient une fois par mois. Nous collaborons en tant que conseillers du vicaire épiscopal. Le tout en continuant à assumer nos fonctions de curé.

– Vous évoquez les unités pastorales, des structures plus grandes que les secteurs paroissiaux qu’elles sont en train de remplacer. A quel prix sont-elles gérables?
Les fidèles devront faire des concessions, notamment en dépassant le cadre de leur paroisse pour se rendre à la messe. Ou en acceptant que des laïcs – voire des bénévoles – qui font partie des équipes pastorales officient durant certains types de célébrations. La décision de passer aux unités pastorales a été motivée par la pénurie de prêtres, le manque de vocations et la baisse de la pratique religieuse. Elle n’a pas été prise de gaieté de cœur. Avant, il y avait un prêtre dans chaque village. Il connaissait tout le monde et pouvait jouer aux cartes au bistrot durant l’après-midi, se rendre au souper du chœur mixte et de la fanfare paroissiale… Si l’on prend l’exemple de la Veveyse aujourd’hui, toutes ses paroisses seront réunies dès cet automne au sein d’une seule unité. Quant à la Glâne, elle en comptera deux.

– Ça devient un peu l’industrie…
Je ne pense pas. Mais c’est vrai que ce sera plus difficile d’appliquer la proximité que nous prônons. Même si beaucoup de fidèles n’attendent pas forcément de connaître le curé personnellement… Pour continuer à fonctionner au mieux, il a fallu fixer des priorités. Nous concentrons désormais nos efforts sur la proposition de la foi, notre rôle principal étant d’amener vers Dieu. Le catholicisme ne coule plus de source dans notre société. D’autre part, la nouvelle structure présente des avantages: la mise en valeur des laïcs, la responsabilisation des paroisses et leur collaboration, par exemple. Ou le travail en équipe, qui autorise un partage des responsabilités selon le charisme de chacun. Le fait d’être plusieurs prêtres nous permettra notamment de partir plus facilement en vacances (rires)…

– A propos, la charge n’est pas trop lourde à supporter pour les curés?
Personnellement, je le vis bien. Il faut dire que je ne suis pas tout seul. Mais c’est vrai qu’on ne chôme pas. Je m’étais amusé à calculer mon nombre d’heures de travail hebdomadaires. En moyenne, entre 70 et 80.

– L’emploi du temps d’un cadre supérieur, le salaire en moins…
Nous avons quand même été bien augmentés: ça tend vers les 65000 francs par an, maintenant. Et tout le monde est logé à la même enseigne: le prêtre qui débute comme l’évêque. Bon, des charges sont venues s’ajouter: le loyer, une participation à la paie de l’aide de cure, le financement de la retraite, les impôts (y compris les paroissiaux, bien sûr), etc. Je pourrais éventuellement sortir de l’Eglise pour en payer un peu moins, mais je crois que ça ne passerait pas très bien (rires)… D’autre part, le célibat nous permet d’être plus disponible pour le travail.

– Pour en revenir aux unités pastorales, comment les paroissiens vivent-ils ce changement? Y a- t-il eu des frictions?
Je n’ai pas reçu de remarques très négatives jusqu’à présent. Les fidèles sont conscients de la situation et la plupart comprennent qu’il n’est plus possible d’en attendre autant qu’autrefois. Mais il faudra du temps aux gens pour s’y faire, évidemment.

Romont, collégiale, messe d’installation dimanche 22 janvier, à 19 h 30

 

Une Eglise qui retrouve l’humilité

– Quel regard portez-vous sur la situation actuelle de l’Eglise catholique?
Pascal Desthieux.
Je trouve qu’elle ne va pas si mal que ça. Chaque jour, je remarque beaucoup de sainteté chez les gens: ils prient, ils vont à la messe, ils vivent l’Evangile… Même des non-pratiquants le font. C’est la preuve que le message est passé. Par contre, c’est vrai que l’on s’achemine vers une Eglise plus «pauvre». Mais je crois que c’est purifiant, elle redevient plus humble. Je souhaite ardemment qu’on aille vers plus de profondeur.

– Votre avis sur la tendance actuelle au «bricolage» des croyances?
Il faut respecter le choix de chacun. Il y a de bonnes choses ailleurs, même si tout ne se vaut pas. Toutefois, je pense que le syncrétisme affadit le message. Et puis une religion, ce n’est pas seulement se servir de concepts qui nous arrangent, mais surtout grandir dans une relation. Pour cela, une certaine continuité est nécessaire. Mais le plus important, c’est de vivre sa spiritualité à fond. Je me souviens avoir été impressionné, lors d’un voyage à Jérusalem, par un marchand de glaces musulman qui avait renoncé à nous servir, car c’était l’heure de sa prière. Un témoignage magnifique.

– Etes-vous favorable à l’ordination des femmes et au mariage des prêtres?
En ce qui concerne les femmes, je trouve que l’on focalise trop le débat sur leur possible ordination. Il existe d’autres fonctions, d’autres services au sein de l’Eglise. Je respecte le choix de Rome sur ce point, même si je comprends pleinement l’aspiration de certaines femmes à accéder à la prêtrise. Je ne serais pas choqué si leur ordination devenait possible. D’ailleurs, ce serait dommage de se passer de forces vives. Mais un tel changement doctrinal entraînerait une rupture profonde dans la tradition. Ce genre de décisions n’est pas facile à prendre. Quant à l’obligation du célibat des prêtres, j’estime – à l’instar des évêques suisses qui en ont fait officiellement la demande – qu’il serait bon d’ordonner des hommes mariés. Même s’il ne faut pas forcément y voir le remède miracle…

Un catholique chez Calvin

Né en 1970 près de Genève dans une famille catholique pratiquante, Pascal Desthieux se sent très tôt appelé par Dieu et décide d’embrasser la prêtrise. Après une maturité dans la cité de Calvin, le séminaire à Fribourg et une année passée au Congo-Zaïre, il est ordonné prêtre à Lausanne en 1997. Vicaire à la paroisse Notre-Dame, il occupe en parallèle le poste de coordinateur du Centre romand des vocations jusqu’en 2001. Auparavant, en 1999, l’évêque le nomme vicaire des paroisses d’Yverdon et de Grandson. Il arrive ensuite à Romont voilà cinq ans.
Guitariste, Pascal Desthieux apprécie la chanson française moderne en général et la musique de Jean-Jacques Goldman en particulier. Il cultive d’autre part un goût pour la photographie et pratique volontiers le sport. Outre le ski, la natation ou la marche, le curé franco-suisse de 35 ans affectionne les sports de raquette: tennis, badminton ou squash, une activité qu’il pratique régulièrement avec le pasteur du chef-lieu glânois.

 

Alexandre Brodard
21 janvier 2006

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