Un petit
clan dirréductibles fait régulièrement parler
de lui à Romont. De qui sagit-il?
Ils sont une quinzaine, âgés de 15 à 20 ans.
Tous bien connus de la police, du juge des mineurs et du cycle dorientation.
Une poignée dentre eux est dorigine étrangère,
ce qui est normal pour un chef-lieu dont la communauté étrangère
représente un tiers de la population. Mais la question des nationalités
est mineure. Leur dénominateur commun réside plutôt
dans loisiveté. Ils ne travaillent pas, ne sont pas inscrits
au chômage, nétudient pas, ne suivent aucun stage
dorientation. Ils passent leur temps à zoner. Certains
parents se désintéressent de leur sort. Dautres
sont totalement désemparés et impuissants.
Ils sévissent
depuis longtemps
Oui, depuis deux ans environ. Et ils ne sen tiennent pas
aux incivilités. Ils ont à leur compte bon nombre de délits,
essentiellement des dommages à la propriété. Ils
frappent de manière cyclique, du côté du cycle dorientation
et du pavillon de la Condémine, et surtout du côté
de la gare et dans les trains. Lanimateur du centre de jeunesse
sest notamment fait démolir sa voiture. Il y a aussi eu
des plaintes concernant des cas de resquille et de racket dans le train
entre Fribourg et Romont. Sans parler des insultes adressées
au personnel des chemins de fer et à la police locale. Et puis,
il y a eu surenchère en début dannée: un
mécanicien de locomotive a été agressé.
Les CFF mont alerté et jai organisé une table
ronde au début février, pour coordonner notre réponse.
Un peu
tard
Pas du tout! Dès le printemps passé, une opération
«Remparts» a été lancée. Un effort
considérable, avec une présence très importante
de la gendarmerie, destiné à cerner la problématique,
à arrêter les gens, à les harceler en quelque sorte.
Cela a abouti à des dénonciations, mais il a fallu des
mois denquête. Il ne suffit pas davoir un soupçon:
identifier les responsables dune soixantaine de délits,
commis par des groupes à géométrie variable, cest
un long processus. Dautant plus quavant toute condamnation,
il y a toujours une tentative de conciliation. La Chambre pénale
des mineurs, qui fait son maximum, a des effectifs réduits et
doit traiter de cas similaires à Bulle, à Châtel,
à Fribourg. Il faudrait quelle soit mieux dotée
et quelle puisse traiter les dossiers des jeunes dans de meilleurs
délais.
Dans limmédiat,
quels sont vos objectifs?
Il faut dabord des moyens de coercition plus forts, pour
casser ce noyau, même si les choses se calment, même si
certaines condamnations sont déjà tombées. La police
ferroviaire na pas de pouvoir en dehors des trains. Quant à
la police locale de Romont, elle ne compte que deux hommes, dont les
moyens dintervention sont restreints. A mon sens, elle peut jouer
un rôle, mais avec lappui de la Police cantonale. De plus,
les transports régionaux, à charge des cantons, ne disposent
ni de contrôleurs, ni de système de vidéo surveillance.
Là encore, ces lacunes tiennent à des motifs économiques.
Fribourg manque aussi dun centre de détention ou de semi-détention
pour adolescents, qui puisse leur inculquer des règles sociales
de base et un projet de vie. Il ny en a aucun dans le canton,
qui ne dispose que dune dizaine de places dans des institutions
vaudoises ou valaisannes. Alors que les prises en charge durent plusieurs
semaines! Il faudra également avoir le courage dincarcérer
certains jeunes dans des prisons adaptées.
En attendant, un vrai travail de réseau simpose, qui mobilisera
notamment les transports publics, la commune, les polices, les inspecteurs
scolaires, le centre de jeunesse. Sur alerte, la préfecture,
en charge de lordre public, officiera comme instance de coordination.
Vous suivez
dautres pistes, moins répressives?
Oui. On doit faire quelque chose pour encadrer les jeunes qui ne
sintéressent pas aux sociétés traditionnelles.
Le Canapé électrique est une initiative structurante bienvenue.
Il faudrait aussi un éducateur de rue qui parte à la rencontre
des autres jeunes. Le projet est entre les mains de la commune et soulève
un problème financier. Jespère quil va se
réaliser.
On constate aussi quil ny a pas dantenne psychosociale
en Glâne. Or, derrière les excès de ces jeunes,
il y a parfois des traumatismes familiaux que lon pourrait déceler
plus tôt. A plus long terme, on devrait aussi songer à
des écoles de jour, qui prendraient en charge les élèves
sur une plus grande durée, tant au primaire quau secondaire.
Il faut désormais tenir compte des disponibilités des
parents: les familles ne fonctionneront plus comme autrefois.
Les jeunes
auront-ils leur mot à dire?
Le Cycle dorientation a toujours eu une grande culture du
dialogue avec eux, et nous continuerons à les écouter
pour cerner leurs difficultés et prévenir les conflits
potentiels. Prochainement, nous organiserons une conférence:
pas un débat dexperts, mais des témoignages de parents
et délèves, lesquels conduiront aussi des réflexions
en classe, avec leurs professeurs. Nous réunirons également
les sociétés locales pour les sensibiliser aux ravages
de lalcool.
La Glâne
pourrait-elle avoir sa propre association Stop Violence?
On ne peut quêtre daccord avec cette initiative
gruérienne. Mais je nenvisage pas dêtre le
moteur dune telle association en Glâne, même si je
la soutiendrais. Je suis plutôt favorable à une action
institutionnelle sur le long terme. La violence est une préoccupation
qui doit dabord être celle des pouvoirs publics, de lécole,
de la police, et ensuite de la société civile. Si la sécurité
et lencadrement des jeunes sont une priorité, les politiques
et les députés devront se donner des moyens de mettre
en place les institutions qui manquent. Il faudra faire des choix.
Une
I Editorial I Gruyère
I Fribourg I Sports
Droits
de reproduction et de diffusion réservés © La Gruyère
2003 Usage strictement personnel