Les relations entre
pouvoir politique et médias sont une longue histoire de suspicions.
Lordonnance que le Conseil dEtat fribourgeois vient dadopter
apporte la preuve que les choses nont pas beaucoup changé.
Laborieusement élaboré, ce texte a fait lobjet dun
rabotage final qui témoigne dune méfiance certaine
envers les journalistes.
En apparence, voilà un document qui ne concerne que le petit
monde médiatique, ce pseudo quatrième pouvoir qui a si
mauvaise presse. Pas de quoi fouetter un chat! Et pourtant
Derrière
cette ordonnance se cache une certaine conception du droit à
linformation, donc de la pratique démocratique.
Pour lessentiel, lordonnance comble une lacune de la législation
fribourgeoise et officialise des pratiques anciennes. Ainsi, le Conseil
dEtat se réjouit de la future utilisation de la voie électronique
pour la diffusion des informations officielles. Cette «innovation»,
pratiquée depuis une décennie dans les autres cantons,
contente également la rédaction de La Gruyère qui
fait, chaque mercredi matin, le voyage de Fribourg pour obtenir son
enveloppe, dûment préparée par la Chancellerie.
Dans lexégèse de son ordonnance, le Conseil dEtat
estime «développer de manière raisonnable»
les moyens de linformation, selon une réglementation «assez
souple». Tout réside dans la définition de cette
souplesse par les différents membres du Gouvernement. Telle quelle
est ficelée, lordonnance laisse à chaque ministre
une liberté dinterprétation qui protège son
propre pouvoir. Au mieux, elle permet quelques innovations à
ceux qui souhaitent faire circuler linformation, au pire, elle
consolide les autres dans leur volonté de statu quo. Car, en
désignant de manière stricte les personnes aptes à
délivrer linformation, en se gardant le privilège
de révoquer un journaliste accrédité, le Gouvernement
livre sa définition de la souplesse
Face à la «liberté de la presse» pratiquée
dans des républiques plus ou moins bananières, il serait
enfantin de chipoter sur les carences de cette ordonnance. Mais il est
tout aussi nécessaire de rappeler les principes qui charpentent
le devoir dinformation dun Etat démocratique. Le
poids croissant de lopinion publique a modifié les rapports
que le citoyen entretient avec le pouvoir politique. Certes, tout ne
mérite pas dêtre rendu public et la transparence
peut être aussi une facette de la dictature. Mais linformation
demeure un enjeu de pouvoir. Ce nest pas le Gouvernement fribourgeois
qui le contredira
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