Formule connue
mais discutable: lhumour serait «la politesse du désespoir».
Et si on disait des vux du Nouvel-An quils sont, eux, la
politesse de lespoir. Car cest une évidence: si lon
nattendait de lavenir que la répétition de
ce qui a précédé, les vux nauraient
aucun sens. Or, ils en ont un: ces «bonne année»
lancés à chaque millésime commençant correspondent,
au-delà dune courtoisie minimale, à une nécessité
partagée qui na rien à voir avec lefficacité
Jusquau bout, cette année 2006 a charrié ses malheurs.
Ici, cest le drame du pont de Grandfey qui a secoué les
consciences; cest limage de ces trois enfants déposant
une rose blanche sur le cercueil de leur jeune maman emportée
par le cancer. Là-bas, ce sont le délabrement de la Palestine,
la tragédie du Liban, le drame de la Somalie
Il ny a pas de raison pour que lannée à venir
prenne le contre-pied de ces noirceurs. «Allez savoir ce que 2007
nous réserve!» Lavertissement est lancé sur
fond dinquiétude sourde. Il serait cependant plus juste,
plus volontaire et plus déterminé de poser la question
autrement: allez savoir ce que nous réservons à 2007!
Car lhomme nest pas un objet déposé sur le
fleuve du temps qui passe. Les courants, les tourbillons et les écueils
le menacent, certes, avec une rare application. Mais nous sommes tous
aux commandes de notre propre embarcation.
Aucune raison, donc, de se méfier a priori de cette nouvelle
année. Pas de procès dintention à faire,
pas de délit de «sale millésime». Chaque année
qui commence est présumée innocente. Cest une page
blanche dont le contenu dépend dabord de nous. Lan
neuf, cest nous!
Il convient alors de vivre pleinement ce temps darrêt suspendu
au douzième coup de minuit. Il prend la forme dune brève
parenthèse où nous pouvons dire, ensemble, non pas ce
qui adviendra, mais ce qui pourrait être si la chance, la volonté,
leffort, la solidarité et le respect de certaines valeurs
se donnaient, pour une fois, la main. Les vux que lon échange
ne seront pas alors des promesses, encore moins des prévisions.
Ils concentreront le souhaitable. Avant que les jours et les saisons
ne proportionnent le possible.
Tels sont les sentiments qui nous animent à lheure
pour le soussigné de mettre en forme ses dixièmes
et derniers vux adressés aux lecteurs de La Gruyère.
Cest au nom de toute la rédaction que nous vous
disons simplement, mais chaleureusement, «bonne année!»
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