FRIBOURG Elections cantonales 2006

La course au Conseil d’Etat est partie

 

Dans un an jour pour jour, le 5 novembre 2006, les Fribourgeois seront appelés à renouveler leur Gouvernement. La perspective semble lointaine pour le commun des électeurs, mais la tension monte sérieusement dans les états-majors des partis. Car l’élection de l’automne prochain ne ressemblera pas aux précédents épisodes. Notamment à cause du départ de trois membres du Conseil d’Etat. Des départs qui ouvrent le jeu électoral et aiguisent les appétits.
Si Ruth Lüthi (PS) et Michel Pittet (PDC) ne font pas mystère de leur retrait gouvernemental, celui du socialiste Claude Grandjean n’a jamais été officiellement annoncé, même s’il est probable au terme de deux législatures passées au Conseil d’Etat par le Châtelois de 62 ans.
La perspective de ces trois sièges engendre une certaine agitation dans les écuries partisanes, actuellement en pleine chasse à la candidature idéale. Ces vacances interviennent dans un contexte politique particulier. L’élection au Gouvernement est parallèle à celle des députés et des préfets: quelques mois après les scrutins communaux.
Sans être encore confirmé, le renouvellement de l’alliance entre PDC et PRD permet d’apporter un soupçon de clarté dans le flou actuel. Il est vraisemblable que les deux partis du centre feront liste commune, avec cinq ou six candidats, dont trois sortants. Du côté démocrate-chrétien, Isabelle Chassot et Beat Vonlanthen peuvent envisager leur réélection – la première pour les deux – de manière sereine. Mais cette sérénité disparaît lorsqu’on ouvre la porte des négociations qui président au choix du – ou des autres – candidat(s). Car le PDC, encore secoué par la gifle des élections nationales de 2003, cultive une certaine morosité. Le climat est entretenu par les difficultés du parti à trouver le candidat du Sud, appelé à succéder à Michel Pittet. Car il est loin le temps où pullulaient les boutures, patiemment élevées en serre par les jardiniers de la démocratie chrétienne fribourgeoise. Les nouvelles pousses se font rares. Et se divisent en deux sortes: celles qui, malgré leur désir d’arrosage gouvernemental, sont tenues loin de l’arrosoir électoral; et celles qui, après maintes sollicitations, ont exprimé le vœu définitif de rester loin des projecteurs du pouvoir. Dans cette dernière catégorie, Christian Castella et Michel Buchmann. Parmi les personnes sollicitées, le nom du juge Michel Lachat revient régulièrement. Comme celui de la présidente du Conseil national, Thérèse Meyer-Kaelin, dont les plurielles implantations géographiques en font une bombe électorale à retardement…
Ce que craint le PDC, c’est la perte de son troisième siège. Cette hypothèse – qui tiendrait de la révolution politique à Fribourg – pourrait devenir réalité si l’UDC sortait de sa manche une candidature d’un calibre exceptionnel. Mais ce n’est pas la direction que prend le parti de Jean-Luc Rimaz. Les candidats «bourgeois-compatibles» – à l’image du préfet de la Veveyse, Michel Chevalley, qui n’est pas intéressé par la charge – ne sont pas légion. Et les élections au Conseil d’Etat neuchâtelois, comme le dernier scrutin bullois, ont apporté la preuve que l’électorat UDC apportait des réponses différenciées en fonction des échéances. Et il semble peu probable que la flambée UDC d’octobre 2003 soit confirmée au soir du 5 novembre 2006. La chance de l’UDC fribourgeoise d’accéder au Conseil d’Etat serait réelle si l’indépendant Pascal Corminbœuf tirait sa révérence. Or, le magistrat de Domdidier va certainement prolonger son mandat dans un collège où il prend plaisir à faire et défaire les majorités. Mais, conformément à son habitude, le conseiller-paysan entretiendra le mystère autour de sa troisième candidature.
Du côté radical, la stratégie comme les candidatures se décantent. Après avoir repoussé l’idée d’une alliance avec l’UDC, les radicaux rentrent au bercail de l’alliance centriste. La décision n’enchante pas nécessairement la base, mais elle est le gage d’une certaine sécurité. Le ministre Claude Lässer – qui semble avoir trouvé ses aises dans les habits de grand argentier – sait que son parti ne dispose pas d’une assise suffisante pour qu’un deuxième radical l’accompagne dans sa troisième législature. Mais les stratèges devront user de finesse pour que le coéquipier du candidat Lässer ne s’approche pas trop du soleil! Le préfet du Lac, Daniel Lehmann, semble actuellement tenir la corde pour ce rôle délicat… Il aurait le redoutable avantage de nourrir les listes radicales de suffrages alémaniques.
Quant aux socialistes, ils sont placés devant une élection décisive, en raison du départ de leurs deux élus. Si le conseiller national Erwin Jutzet apparaît comme le successeur désigné de Ruth Lüthi, naturellement porté par une Singine toujours au garde-à-vous lorsqu’il s’agit de défendre l’un des siens, le successeur de Claude Grandjean demeure encore dans le flou. Les responsables du PS n’ont pas encore défini la stratégie gagnante, mais circulent les noms de la Touraine Anne-Claude Demierre – actuelle présidente du Grand Conseil – de la conseillère communale de Villars-sur-Glâne Erika Schnyder et du député Jean-François Steiert sont les plus cités. Difficile tâche pour le PS de faire le tri parmi de nombreux prétendants, parfois peu connus. Mais on sait que la discipline de vote permet à la gauche de placer des figures, dont la notoriété n’est pas la qualité principale.
Mais du 5 novembre 2005 au 5 novembre 2006, il y a 365 jours qui tiennent, en politique, d’une éternité….


Patrice Borcard
5 novembre 2005

Une I Editorial I Gruyère I Fribourg I Sports

Droits de reproduction et de diffusion réservés © La Gruyère 2003 – Usage strictement personnel