VEVEYSE
Infré
Semsales
à lheure du thé
Leader
européen de lextraction de la théine, Infré
SA veut déménager de Vevey à Semsales. Achevée
hier, la mise à lenquête partielle du plan daménagement
na apparemment soulevé aucune opposition. Une perspective
réjouissante pour le Conseil communal, qui lutte depuis dix ans
pour développer la zone artisanale Clos Laviau.
Coût, visibilité,
proximité avec Vevey: pour Infré, le terrain de Semsales,
situé près du pont autoroutier de la Rougève, est
idéal
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«Ce ne sera
pas le Taj Mahal!» lâche le directeur dInfré,
Martin Hodler. Pourtant, aussi fonctionnelle soit-elle, la nouvelle
usine du leader européen de la décaféination du
thé, qui sera construite à Semsales, cristallisera un
vieux rêve du Conseil communal: développer sa zone artisanale
Clos Laviau. Une nouvelle étape a été franchie
hier, avec la fin de la mise à lenquête dune
modification du plan daménagement de cette zone. «Nous
navons reçu aucune opposition, se réjouit la syndique
Raymonde Favre, qui espère toutefois quaucun retardataire
ne se signalera «Cest le cachet de la poste qui fait
foi!»
Du côté dInfré, on boucle les derniers détails
du budget: entre 10 et 14 millions de francs seront investis. Daccord
sur le principe, le conseil dadministration donnera son feu vert
début février. «Si tout va bien, nous devrions pouvoir
commencer la production à Semsales en octobre 2005», estime
Martin Hodler, également président du conseil dadministration
dInfré.
La raison de cette implantation? En pleine croissance, Infré
veut augmenter sa capacité de production pour se profiler sur
le marché mondial (lire ci-contre). Des ambitions que le site
de production actuel, basé à Vevey depuis la fondation
de la société, en 1946, ne permet pas de réaliser.
«A Vevey, nous pouvons produire 2300 tonnes par an au maximum,
explique le directeur. Lusine de Semsales nous permettra de doubler
ce chiffre.»
Autre avantage de ce déménagement: il permettra de réorganiser
la ligne de production actuelle. «Pour ne pas briser les feuilles
de thé, nous devons assurer un flux descendant à travers
lusine. Doù cette demande de modification du règlement
durbanisation, qui nous permettra dinstaller dans lusine
deux à trois silos de stockage, dune hauteur de 18 m environ.»
En bordure dautoroute
Construit en escaliers sur deux à trois niveaux, le bâtiment
mesurera environ 30 mètres sur 40. «Mais il sera bien intégré
au paysage, souligne aussitôt le directeur. Et les Semsalois nauront
aucune nuisance à craindre.» Lautoroute voisine
lusine prendra place à deux pas du pont de la Rougève,
côté Progens couvrira les émissions sonores,
dailleurs minimes. Et lusine ne recevra que deux à
trois camions par semaine. Aucun risque, non plus, du côté
du solvant utilisé pour lextraction de la caféine
(le chlorure de méthylène), qui tourne en circuit fermé.
Pour Semsales, pas ou peu demplois en perspective. La direction
commerciale restera à Berne. Et Infré, qui exploitera
dabord les deux sites simultanément avant de raser celui
de Vevey, emploiera à terme ses effectifs normaux: trois équipes,
soit une vingtaine de personnes. «Conserver ce personnel expérimenté
était une préoccupation centrale, car cest la carte
maîtresse de lentreprise. La proximité de Semsales
à donc pesé sur notre décision», relève
Martin Hodler. Tout en signalant que la taille du terrain (10000 à
12000 mètres carrés) permettra à lentreprise
de sagrandir si nécessaire.
Site attractif
«Le site était aussi attractif. Cest un terrain plat,
visible depuis lautoroute et bon marché», précise
encore le directeur. Lequel ne cache pas que loffre de Semsales
(35 francs par mètre carré, pour un terrain équipé
aux frais de la commune), était bien plus séduisante que
celle de Châtel-Saint-Denis (La Gruyère du 11 décembre).
Sans compter les exonérations dimpôts, déjà
préavisées positivement par le canton et la commune.
«Nous avons effectivement reçu lappui de la Direction
de léconomie et de celle de laménagement»,
salue Raymonde Favre. Pour la syndique de Semsales, larrivée
dInfré marque laboutissement de plus de dix ans de
démarches administratives: «Ce secteur est un solde du
remaniement parcellaire lié à la construction de lautoroute.
Depuis 1993, la commune a tout fait pour mettre ces 30000 mètres
carrés de terrain agricole en zone artisanale et les acheter.
Il a fallu être têtu, quitte à refaire tout le plan
daménagement.»
Boule de neige
Mais comment tirer son épingle du jeu, face à des pôles
dattraction comme Châtel-St-Denis, Bulle ou Vaulruz? «Il
faut persuader les entrepreneurs de venir voir sur place. Jai
même fait le trajet Châtel-St-Denis - Semsales chronomètre
en main pour convaincre Infré, sourit Raymonde Favre. La présence
de zones à bâtir déjà équipées
a aussi joué.» La syndique espère que cette première
implantation attirera quelques nouveaux citoyens. Et quelle fera
boule de neige. Deux PME, dont la syndique ne souhaite pas révéler
le nom, souhaitent déjà sinstaller au Clos Laviau.
Le
monde pour ambition
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Détenue
pour moitié par la société italienne Bonomelli
(filiale de Montenegro) et pour moitié par un citoyen
bernois, Infré SA se concentre uniquement sur la transformation
du thé. Aucun sachet ne sortira donc de sa ligne de production.
Principal client de lentreprise, dont le chiffre daffaires
est tenu secret: le groupe britannique PI Foods, qui diffuse
quelque 1300 tonnes de thé décaféiné
par Infré, sous la marque Typhoo, numéro 1 en
Angleterre. Une faible proportion du thé traité
à Vevey (10 tonnes) est aussi conditionnée et
distribuée en Suisse sous la marque Infré, par
une filiale de Twinings. Quelque 115 tonnes arrosent également
le marché italien, via la société Bonomelli.
Selon Martin Hodler, directeur dInfré, entre 17000
et 20000 tonnes de thé décaféiné
sont produites annuellement dans le monde. Une goutte deau
(0,5%) face à la production mondiale de thé, qui
avoisinait les trois millions de tonnes lannée
passée. En Suisse, le thé décaféiné
représente 3% de la production de thé (environ
800 tonnes) et croît dun peu plus dune tonne
(5%) par année.
«Il reste donc un grand potentiel, en particulier pour
lextraction par chlorure de méthylène»,
note le directeur. Passée au crible par des laboratoires
universitaires, cette méthode préserve en effet
les antioxydants, les vitamines, les sels minéraux et
les oligo-éléments du thé. «Elle
est plus prometteuse, en termes de santé et décologie,
que les méthodes concurrentes, à base de CO2 ou
dacétate déthyle, poursuit Martin
Hodler. Elle est également plus prometteuse que le thé
génétiquement modifié. Privé de
sa caféine originelle, ce thé est du coup privé
de son insecticide naturel. Doù des coûts
de production très élevés...»
Autant datouts qui donnent des ailes à Infré:
«Dès que le site de Semsales sera prêt, nous
allons prospecter du côté de lAsie. De lAmérique,
aussi: cest un marché où nous serons des
pionniers, puisque nous devons encore y faire légaliser
notre méthode de décaféination.»
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Caféine
prisée
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Plutôt
inventive, la société Infré. Sa méthode
dextraction de la caféine, brevetée en 1932
par le fondateur de lentreprise, lAllemand Theodor
Grethe, nest pas sa seule innovation. Infré a également
découvert
un procédé de cristallisation de la caféine.
Un procédé qui lui permet découler
ce stimulant, purifié par des intermédiaires,
vers lindustrie alimentaire Coca et Redbull notamment.
Le secteur pharmaceutique lutilise également pour
contrer leffet soporifique de certains médicaments.
Pourtant réputé pour ses vertus tranquillisantes,
le thé contient davantage de caféine (aussi appelée
théine) que le café: entre 2,5 et 3,5%, contre
1% environ. Mais les deux boissons nont guère le
même effet, signale au passage Martin
Hodler, chimiste de formation. «La caféine du thé
forme un complexe avec les antioxydants et se libère
plus tardivement. Autrement dit, leffet excitant augmente,
puis diminue régulièrement, en atteignant son
maximum deux heures environ après consommation. Par contre,
la caféine du café, plus soluble, agit dune
manière plus intense, durant la première heure
qui suit lingestion.»
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