VEVEYSE Xavier Grandjean

De l’autre côté de la scène

Ex DJ du Bartiste, féru de rock et de découvertes musicales, Xavier Grandjean préside l’association Tuls music, fondée en janvier à Attalens. Une association née des cendres du festival de Savigny, qui organise ce samedi sa première soirée, à l’Auberge de l’Ange.


Les pertes financières du festival de Savigny ont modéré les ambitions de Xavier Grandjean. Pour l’instant… (V. Brodard)

L’envers de la scène, les musiciens, l’effervescence des backstages: il n’en faut pas plus pour faire vibrer Xavier Grandjean. Ou plutôt si. Il lui faut encore un public à faire frissonner, histoire d’entrer en résonance. Avec ses deux complices, les Attalensois Fabien Molleyres et Serge Pittet, 24 et 25 ans, ce Veveysan de 25 ans domicilié à La Tour-de-Peilz a derrière lui l’organisation de deux festivals. Dont le monumental Rock’S Festival de Savigny, en mai dernier: 22 groupes en trois jours sur deux scènes, un staff de 150 pros et bénévoles, 2700 spectateurs, pour un budget de 350000 francs et… une perte sèche de 90000 francs.
«On est des malades», sourit rétrospectivement Xavier Grandjean. Lui (courtier en assurances) et ses amis (chauffagiste et magasinier) ont puisé dans leurs propres poches pour éponger la moitié des créances. «On était protégés par nos statuts, mais on trouvait normal de faire quelque chose pour les petits commerçants qui nous ont aidés. On a contacté quantité d’institutions qui ne nous ont donné aucun soutien financier, malgré l’ampleur de l’événement. Ça nous a démolis», confie-t-il. Pas tout à fait démolis, cependant, puisque les trois compères, ainsi que Benoît Grandjean, frère de Xavier, ont fondé en janvier dernier une nouvelle association d’organisation de concerts, Tuls music, à Attalens. Leur créneau reprend celui de feu Around Music, en faillite depuis Savigny: promouvoir la musique helvétique, de la chanson au metal en passant par le rock.
C’est qu’il aurait été impossible, pour le Veveysan, de retrouver l’endroit du décor, ou même de retourner définitivement à ses platines de DJ. Xavier Grandjean aime trop se mettre à l’affût des nouveautés, prospecter sur le net, écumer les petites scènes des festivals, et surtout partager et faire découvrir. «Les groupes suisses ont un énorme potentiel et sont restés des artistes. Mais ce qui manque, c’est une promotion, un moyen d’attirer les agences de production. De mon côté, je connais bien les goûts du public de la région, qui n’est pas saturée de clubs, et j’ai pas mal de flair.» Le marché dira, par exemple, si le groupe de pop rock allemand Slut, anagramme de Tuls, est promis à l’avenir que le trio lui promet.

«Fiers de ce qu’on a fait»
Et puis, le souvenir de Savigny demeure dans l’esprit du Veveysan. Il y a bien sûr les tuiles, le mauvais temps continu. Il y a aussi «les groupes réputés qui se prennent un peu trop le chou», le «monde de requins» formé par leurs agents, les contraintes techniques ou les rivalités entre festivals. «Mais je retiens surtout le contact avec les festivaliers, les musiciens géniaux et le coup de chapeau que le milieu nous a rendu. Aujourd’hui encore, on reçoit des appels pour organiser une deuxième édition. On est trop fiers de ce qu’on a fait pour s’arrêter là.»
Pour l’instant, les trois accros vont donc se contenter de modérer leurs ambitions. Ils comptent mettre sur pied quatre festivals par année à l’Auberge de l’Ange, à Attalens. Le premier, ce samedi, affiche un budget de 7500 francs, que 350 entrées devraient suffire à couvrir (lire encadré). Tuls music se chargera aussi de la programmation du bar La Bomba, à Bossonnens, et rééditera le Festival du Marais. L’association se profile enfin comme une société d’organisation de concerts, au service des sociétés de développement et de jeunesse.
Pas d’autre rêve, vraiment? «Si, un gros projet pour la région à l’horizon 2007, finit par lâcher le Veveysan. Ce sera un festival d’hiver, tout public, avec un budget d’environ 500000 francs et un gros comité d’organisation. On est en train de préparer le dossier pour commencer la recherche de fonds. Si on obtient un peu plus de la moitié de ce budget, on se lance…»

Valeurs sûres à Attalens

Pour lancer la machine, Tuls n’a pris aucun risque: son premier festival, ce samedi à Attalens, sera dédié au metal. «Plus qu’un genre, c’est une culture, note Xavier Grandjean. L’étiquette suffit à déplacer le public, qui n’a pas peur de la découverte. Pour le rock, c’est plus délicat.» Tout en rythmiques lourdes et puissantes, c’est le groupe Twisted, de Vevey, qui annoncera la couleur. Suivront les Valaisans d’Absorbed, des calmes-forcenés qui explorent tous les styles de metal. Plus accessibles, les Lausannois de Kandyss, déjà présents à Savigny, distilleront leur fusion hardcore un brin groovy. Quant à la tête d’affiche, elle va à Houston Swing Engine: les Lausannois tournent depuis peu avec leur nouvel album, The tiger flamboyant.

Attalens, salle de l’Auberge de l’Ange, samedi 19 février, 20 h, ouverture des portes à 19 h 15

 

 

Stéphane Sanchez
17 février 2005

Une I Editorial I Gruyère I Fribourg I Sports

Droits de reproduction et de diffusion réservés © La Gruyère 2003 – Usage strictement personnel