GRUYÈRE Course d’école

Un bain de foule en Gruyère

Le Conseil fédéral a eu droit jeudi à un bain de foule à Espace Gruyère. Plus de 2000 personnes, ados et adultes, se pressaient pour serrer la main de Pascal Couchepin et Seppi Deiss, ou avoir un autographe de Christoph Blocher…


A Espace Gruyère, bain de foule, alors qu’à Fribourg, on se mouille

 

Sirène et voitures de police, jeudi sous le coup de 17 h 25 pour annoncer l’arriver des sept Sages, à Espace Gruyère, à Bulle. Première surprise: aucun ballet de grosses limousines pour amener le Conseil fédéral in corpore à la clôture du CO de la Gruyère qui fête ses 150 ans. Mais un simple bus immatriculé à Berne, qui a déchargé ses augustes hôtes devant l’entrée principale du bâtiment. Deuzio: les six conseillers fédéraux – sauf Micheline Calmy-Rey et la chancelière fédérale Annemarie Huber-Hotz – étaient en chemise polo, sans cravate. Tertio: la sécurité autour des conseillers était bon enfant et il y a eu un vrai bain de foule! C’était réellement décontracté et ça sentait les vacances…
Dès l’arrivée des conseillers fédéraux, un petit groupe de jeunes a commencé à scander «Blocher». Début de manif? Mais non, plutôt le signe avant-coureur annonçant la pluie d’autographes que le conseiller UDC a dû signer. Du haut de son mètre soixante, Christoph Blocher était aux anges: il n’a pas arrêté pendant trente bonnes minutes de signer sur des t-shirts à croix blanche et des feuilles. Le journaliste de service a distribué à qui mieux mieux des pages vierges qui quelques minutes plus tard portaient l’auguste signature.
Fiona, 13 ans, a décroché le paraphe ministériel: «Pour moi, c’est un souvenir de cette journée». idem du côté des adultes: «Je suis secrétaire de l’UDC gruérienne. C’est pour mon fils Adrian», explique Evelyne Etienne. A vingt mètres de là, Pascal Couchepin saluait jeunes et adultes. Comme d’habitude, il a le tutoiement facile: «Salut», dit-il à ces jeunes ainsi qu’à ces radicaux gruériens. Plus loin encore, une mèche blanche. C’était bien Micheline Calmy-Rey, assaillie par une foule de tout âge. La Genevoise n’a pas décollé le nez des feuilles pour signer une ribambelle d’autographes.
La rencontre avec les Gruériens a duré 45 minutes, puis le convoi officiel a pris la route de Charmey, où la délégation a pris ses quartiers à l’Hôtel Cailler, à Charmey, pour y passer la nuit, avant de s’habiller pour le repas du soir servi à Gruyères. Avec 40 minutes de retard sur le programme, le Conseil fédéral est arrivé aux portes de la cité comtale, où Christian Bussard les a accueillis. Pour l’occasion, le syndic de Gruyère arborait une superbe cravate rouge, frappée de grues tout en blanc.
La sortie d’école est plutôt un parcours du combattant, non? «Pas du tout. Mes collègues me disent qu’ils n’ont pas l’impression d’être chassés. Dans d’autres sorties, nous devons emprunter l’hélicoptère en raison des distances», répond le président de la Confédération très souriant.

Leuenberger chez Giger
Devant le bar Giger, Moritz Leuenberger a craqué et s’est fait inviter au Musée du père des Aliens et de La Mutante. La codirectrice Ingrid Lehner est très heureuse d’ouvrir les portes de son institution pour une visite au pas de charge. Vingt minutes, montre en main. Le vice-chancelier Achille Casanova était aussi de la partie. Les deux hommes apprécient l’œuvre du Zurichois Hans Ruedi Giger, sans être des fans forcenés. «Nous sommes en retard. Nous n’obéissons pas au président», lance Moritz Leuenberger qui quitte rapidement le musée, promettant d’y revenir.
Dans la cour du château de Gruyères, les six cors des Alpes de l’Intyamon jouent déjà pour agrémenter l’apéritif. Il y a bien sûr du Saint-Saphorin Les Faverges 2003 de l’Etat de Fribourg. Le chef Orlando Grisoni est aux fourneaux pour conquérir les papilles du Conseil fédéral. Au menu: mille-feuilles de foies gras de canard, loup de ligne vapeur, filet de selle de veau juste cuit, sans oublier le Gruyère et la tomme bien crémeuse ainsi que la fantaisie de pêche et framboises. Un sauvignon genevois et une syrah valaisanne accompagnent cette symphonie. «Un clin d’œil aux vins de Suisse romande pour faire plaisir à Micheline Calmy-Rey et Pascal Couchepin», lance le chef de La Tour-de-Trême qui sert le banquet dans la salle des Chevaliers. Comme au bon vieux temps des comtes de Gruyères
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Passage à Fribourg Pied de nez au Röstigraben

Salves d’applaudissements, discours et croissants fourrés pour l’arrivée du Conseil fédéral dans les jardins du Collège Saint-Michel. Une agréable mise en bouche avant les aventures concoctées par Hubert Audriaz.
Les jardins du Collège Saint-Michel ont accueilli des conseillers fédéraux très décontractés, ce jeudi matin. Devant la statue de Pierre Canisius, Nicolas Renevey a salué le retour de Joseph Deiss «entre les murs du passé et la force de la jeunesse».
Des murs que le président de la Confédération a hanté durant près de quarante ans. «Décidément il s’accroche», lançait à la foule le porte-parole des élèves, Alain Guerry, dans un discours plein d’humour et de mordant. En effet, non content d’être entré en 1958 comme élève à Saint-Michel, Joseph Deiss y revint comme pion, puis comme professeur, pour en ressortir quarante ans plus tard, bac en poche!
Cette boutade a été reprise en souriant par Joseph Deiss, heureux de retrouver Saint-Michel qu’il considère un peu comme sa maison: «Un endroit où l’on se retrouve, où l’on se sent bien et que l’on ne voudrait jamais quitter.»

Mouvements d’humeur
Tandis que les discours s’égrainent et que quelques gouttes de pluie rafraîchissent l’atmosphère, une banderole se déroule aux fenêtres du collège, dénonçant l’accès à la formation réservé aux seuls riches. Un slogan, «Uni nur für Reiche», surmontant un panneau de circulation d’interdiction de tourner sur la droite. A l’origine de ce mini-mouvement d’humeur très vite canalisé, un étudiant explique: «Par cette pancarte, nous voulons montrer notre opposition au Conseil fédéral et le fait que cette visite ne nous enchante pas.»
Exceptés d’autres cas isolés visant plus particulièrement Christoph Blocher – banderole «Blocher persona non grata» et offrande d’un panier garni accompagné d’une carte critiquant la politique d’asile – le public était ravi. Ainsi Guillaume, élève de 3e année, qui a beaucoup apprécié le discours de Joseph Deiss, en compagnie de ses camarades, Sami et Thevien, moins férus de politique, mais ayant apprécié l’apéritif.
Parmi les rares citoyens de la ville à avoir répondu à l’invitation, Sophie Waldner ne regrette pas le déplacement: «Je suis une groupie du syndic et je voulais surtout faire honneur au Conseil fédéral», lance en riant la galeriste fribourgeoise.

Audriaz en «instit»
Et tandis que le public se disperse, les conseillers fédéraux rejoignent le restaurant du Schild, à la Neuville, où les attend un délicieux repas. «C’est l’horreur comme on a bien mangé», lancera un peu plus tard, Pascal Couchepin, à peine les pieds hors de l’eau.
C’est qu’Hubert Audriaz a plus d’un tour dans son sac pour amuser la galerie. A commencer par la traversée de la Sarine à gué, manière originale de traverser le fameux Röstigraben. Et Moritz Leuenberger une fois sur l’autre rive d’avouer: «J’ai trouvé la traversée assez agréable, moi qui suis normalement obligé de nager en politique!»
A travers les différentes stations disséminées entre le pont Saint-Jean en Basse-Ville et la ferme de l’artiste au Grabensaal, les conseillers fédéraux ont pu tester leurs cinq sens + 1, créé pour l’occasion par le magicien Audriaz: l’intuition, si capitale en politique.


Christophe Schaller
3 juillet 2004

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