Serolab à Remaufens
Vaccin antinicotine en vue

En s’installant dans l’usine précédemment occupée par Vauthey Lift à Remaufens,
la firme lausannoise Serolab, spécialisée dans les médicaments immunobiologiques, a apporté à la région une activité et des emplois à haute valeur ajoutée.


André Coutaz, directeur de Serolab, dans les locaux de la nouvelle succursale à Remaufens (M. Angel)

Du blanc, du bleu, de l’argenté, un silence feutré. Des congélateurs immenses, où s’alignent des rangées de flacons de sérum. Dans des locaux aseptisés, des hommes et des femmes tout habillés du même bleu, cheveux enserrés dans des bonnets de chirurgien. Une am-biance entre vaisseau spatial et salle d’opération.
Il est difficile d’imaginer que ces vastes locaux (2200 m2) situés dans la zone artisanale de Remaufens, en bordure de la route cantonale Châtel-Bossonnens, étaient ceux, il n’y a pas si longtemps, de l’entreprise d’ascenseurs Vauthey Lift!
Adieu poussière industrielle, bonjour l’aseptie. Ici, la lutte contre les microbes est une préoccupation de chaque instant. Certaines places de travail sont «chassées» en permanence par des flux luminaires garantissant une hygiène plus élevée, encore, que dans une salle d’opération. Et cela vaut aussi pour l’eau, qui est filtrée et totalement purifiée.

Plus de 2 mio de travaux
Au terme de travaux dans lesquels plus de deux millions de francs ont été investis, cette usine est devenue, en octobre dernier, la succursale de la firme vaudoise Serolab. Fondée en 1958 par Jean Thomas, d’origine française, installée au Chalet-à-Gobet, dans les hauteurs de Lausanne, elle est active dans la production de médicaments dont la plupart agissent sur le système immunitaire ou tout autre tissu ou organe. L’un des plus connus est le Sérocytol. A Savigny, Serolab dispose d’une ferme où sont élevés une quarantaine de chevaux qui permettent la production d’anticorps. «L’été, ces animaux sont à l’alpage du côté de Champéry, où ils sont l’attraction locale, vu leur nombre», dit André Coutaz, en précisant que ces chevaux, ponctionnés une fois par an, sont encadrés par un vétérinaire.

Tapis rouge sur Fribourg
Mais pourquoi et comment Remaufens, alors que l’extension souhaitée par Serolab aurait pu se faire à Aubonne? «Cette usine à vendre, avec des possibilités de surélévation, c’est exactement ce que je cherchais!» dit Alain Coutaz, directeur général et président du conseil d’administration de Serolab depuis 20 ans.
«C’est par hasard, en me promenant dans la région, que j’ai trouvé cette usine. Remaufens est, comme Le Chalet-à-Gobet, proche d’une entrée d’autoroute. Et la distance entre les deux sites est modeste. En outre, la Promotion économique du canton de Fribourg nous a réservé un excellent accueil», poursuit André Coutaz. Qui n’attend plus, maintenant, que la fin des travaux de correction de la route cantonale afin de terminer l’aménagement des alentours de la succursale de Remaufens.

La pointe de la recherche
Serolab a plusieurs axes d’activité. «Le principal, c’est la production de sérums et de vaccins allopathiques pour traiter des maladies chroniques et dégénératives. Relevant de la biotechnologie, cette discipline fait l’objet, en permanence, de recherches et de développements, à la lumière des nouvelles découvertes. L’immunologie est assez récente», explique André Coutaz, qui fait cas, notamment, des travaux d’une équipe de chercheurs dans le domaine ophtalmologique et auditif (reconstruction au niveau du tympan). «Notre secteur de base, c’est la rhumatologie».
Les injectables (à Lausanne) et les suppositoires (à Remaufens) sont fabriqués dans des conditions d’aseptie extrêment rigoureuses. «Dans ce type d’injectables, il y a Serono et nous», précise André Coutaz. Les immunomodulants (qui agissent sur le système immunitaire) sont largement destinés à l’exportation (80%). Serolab dispose de représentations à Bruxelles, Munich, Milan et Caracas (Vénézuéla), pays où son agent travaille pour l’entier de l’Amérique.

Vaccin contre la nicotine
En collaboration avec les instituts de biochimie de l’Université de Lausanne et de chimie organique de l’EPFL – une équipe plurisiciplinaire autour du Dr Erich Cerny – Serolab est par ailleurs en train de travailler sur la création d’un vaccin antinicotine, «autant préventif que curatif». Les essais sur la souris se sont révélés probants. Restent les tests cliniques sur l’homme, en collaboration avec l’Hôpital universitaire de Saint-Gall: c’est pour bientôt. «Les Anglais et les Américains planchent aussi là-dessus. Mais nous avons un peu d’avance», dit André Coutaz.
Le principe de base de ce vaccin, c’est l’injection d’une molécule de nicotine modifiée qui provoquera la fabrication d’anticorps susceptibles d’empêcher l’arrivée de la nicotine au cerveau. Sans ce stimulant, qui favorise également la dépendance, la cigarette perd tout son attrait pour le fumeur, qui devrait donc y renoncer…

Homéopathie sous licence
La succursale de Remaufens travaille par ailleurs sous licence pour les laboratoires français Boiron, dont le siège central se trouve à Lyon (2200 collaborateurs). Leader mondial dans le secteur de l’homéopathie, cette entreprise, qui a conservé son caractère familial, a été fondée par Jean et Henri Boiron.
«Nous avons la licence pour le marché suisse. Le produit phare, c’est “Oscillococcinum”, un médicament contre les états grippaux», explique André Coutaz. «L’Université donne des cours d’homéopathie à option. A Remaufens, ce secteur va se développer». Pour l’heure, il représente le tiers de la production totale de Serolab.
Début mai, Serolab inaugure officiellement ses locaux en Veveyse et organise, par la même occasion, des journées pour pharmaciens et pour médecins en provenance de plusieurs pays, avec des séminaires, des exposés et des conférences. Des spécialistes qui en profiteront pour découvrir la région en touristes, également…

Heureux d’être ici
En tout, Serolab compte une soixantaine de collaborateurs, qui fluctuent, à égalité, entre les sites de Lausanne et de Remaufens, en fonction des nécessités.
«Nous avions fait une enquête, au sein de notre personnel, pour savoir où il préférerait travailler, entre Aubonne, où nous avions des possibilités d’extension, et Remaufens, qui a finalement eu la préférence.»
Des gens travaillant initialement à Lausanne ont déménagé sur Fribourg. Des personnes de la région ont par ailleurs été engagées. «Nous sommes heureux d’être ici», dit en conclusion André Coutaz.

Marie-Paule Angel / 31 décembre 2002