Porte-parole
et chancelier de l'évêché depuis le 1er juillet,
Nicolas Betticher a connu une entrée en matière très
animée avec loccupation par les sans-papiers de léglise
du Schoenberg à Fribourg. Pour le nouveau bras droit de Mgr
Bernard Genoud, lavenir de lEglise catholique passe par
une présence à réinventer dans une société
très laïcisée.
Jacques Chavaz
quitte la fédération, mais sa passion
pour lélevage reste intacte
(C. Dutoit)
Comment
vend-on le produit «Eglise» aujourd'hui?
On doit bien sûr continuer à offrir un ministère
dominical pour les 5 à 15% de pratiquants. Mais il faut offrir
aux autres des événements tels que «Prier-Témoigner»,
qui a attiré de nombreux jeunes ce week-end à Fribourg.
C'est-à-dire des présences de lEglise très
fortes en émotions et avec un message clair. Jean-Paul II fait
ça à merveille. Il faut pour cela des personnalités
dEglise fortes. Mgr Bernard Genoud en est une.
Cela
ne vous choque-t-il pas qu'on puisse parler de l'Eglise comme d'un
produit?
Je naime pas parler en ces termes, parce que lEglise nest
pas un produit qu'on vend. Mais on doit vivre avec notre temps. Le
Christ a très bien fait cela dailleurs. Et notre temps
vit d'un marketing total. LEglise n'est pas complètement
déconnectée. Elle sincarne dans un système
de produits. Seulement, je mettrai tous les garde-fous pour que ce
ne soit pas un produit qui saffiche entre une brosse à
dents et un tube dentifrice. LEglise doit rejoindre les gens
par les canaux de communication de son époque.
Comment
mieux vendre lEglise dans une société très
laïcisée?
Dabord, on na pas à vendre. On doit être
témoin. Et cest vrai quêtre témoin,
cest parfois aller à contre-courant. Eh bien, tant pis.
La meilleure manière de dire sa foi, cest d'être
vrai en société. On va automatiquement diviser. Certains
seront convaincus. Dautres seront touchés. Dautres
seront contre. Mais cela découle de la réalité
de la foi qui est une exigence.
LEglise
entretient des relations souvent conflictuelles avec les médias.
A qui la faute?
Je ne vois pas tellement de conflits. LEglise catholique est
très présente sur la scène médiatique.
S'il y avait un véritable conflit, on ne parlerait plus de
nous. Bien sûr, les médias sont critiques. Mais je trouve
cela positif. Cela nous impose une révision quotidienne de
nos mécanismes de communication.
On fait
souvent le reproche aux médias de caricaturer les positions
de lEglise, celles du pape en particulier. Vous ne partagez
pas cet avis?
Parfois oui. Il y a des journaux de boulevard qui font cela, en Suisse
allemande notamment. Cest une stratégie de vente. Mais
la grande majorité des médias en Suisse reflète
ce que lEglise dit. Ensuite, le message de lEglise est
bien ou mal reçu. Cest une autre affaire.
Comme
nouveau porte-parole de lévêque, vous avez eu une
entrée en matière délicate avec loccupation
par les sans-papiers de léglise du Schoenberg à
Fribourg. Quel jugement portez-vous sur la communication de lEglise
dans cette affaire?
Il est difficile davoir un seul message quand il y a des sujets
qui sont sous lautorité de plusieurs personnes. Durant
tout lété, la communication a été
difficile. On a essayé de faire au mieux avec tous ces différents
acteurs. Cela démontre aussi une richesse, une diversité
au sein de lEglise. Et sur le fond, tout le monde était
d'accord pour dire qu'il est inacceptable que, dans ce pays, il y
a des gens qui travaillent, dont les enfants sont à l'école
et qui nont pas de papiers. Comme le dit lévêque,
il est inacceptable qu'il y ait 600000 bras sans visage en Suisse.
Où
en est-on aujourd'hui? Lévêque a-t-il gardé
des contacts avec le Collectif des sans-papiers?
Non. Les sans-papiers ont quitté léglise Saint-Paul.
Ils ne lont pas recontacté. Mgr Genoud et ses confrères
évêques ont porté cette question à son
juste niveau, à Berne, où la loi sur les étrangers
doit être réformée. Cest là que doit
se situer le vrai débat et les évêques sengagent
à fond pour qu'il ait lieu.
Pour
vous, le dossier de loccupation de l'église du Schoenberg
est-il clos?
Objectivement, il n'y a plus personne là-bas. Maintenant, la
paroisse doit faire un processus de réconciliation. Cela prend
du temps.
Vous
êtes depuis quelques mois le bras droit de Mgr Genoud. Comment
vivez-vous votre tandem avec lui?
C'est quelquun que japprécie énormément
parce quil me fait confiance. Avec lui et avec le vicaire général,
labbé Rémy Berchier, on forme un trio qui travaille
en osmose.
On connaît
les talents de communicateur de Mgr Genoud. Est-il aussi un homme
de dossiers, de gestion des affaires diocésaines?
Cela dépend de ce que vous entendez par là. Sur les
gros dossiers, il est lhomme de la situation. Tout le reste,
la petite paperasse, ce nest pas le rôle de lévêque.
Cest notre rôle de le décharger de tout cela pour
qu'il puisse se consacrer aux vraies questions. Son job, cest
dêtre sur le terrain avec les prêtres et les laïcs
permanents pour expliquer la foi et faire envie de croire. Il doit
être le moins possible dans son bureau.
L'Eglise
diocésaine na-t-elle pas un urgent besoin de réformes
structurelles?
Oui. On ne peut plus assurer une présence dEglise dans
chaque village. Et même si on avait assez de prêtres,
on ne le ferait pas. Il faut accepter que les gens aient dautres
lieux de vie que jadis, où tout tournait autour de lécole,
de la mairie et de léglise. Le phénomène
Don Camillo, cest fini. Les gens bougent et lEglise doit
être présente là où sont les gens. Il y
a une présence dEglise à réinventer.