Faut-il être
complètement «fada» pour parfaire sa maîtrise
de lorthographe en jouant aux cartes? Probablement. Cest
apparemment lavis des éditions du même nom, à
Fribourg, qui ont imaginé un nouveau jeu de cartes. Après
une méthode pour apprendre lorthographe, intitulée
Miskéo, en 2000, Séki est le premier jeu des Editions
«fada!» à faire son apparition dans les librairies
de Suisse romande. «On le trouve aussi chez Manor grâce
à notre distributeur Servidis», précise Martino
Toscanelli, lun des concepteurs (lire interview).
En quoi consiste ce jeu résolument rigolo (attention le piège
du féminin: rigolote) prévu pour deux ou quatre personnes,
dès 8 ans? A tour de rôle, les joueurs lancent le dé,
et, selon leur score, héritent dune question facile ou
difficile. Si le dé affiche 2, par exemple, ils devront trouver
un intrus dans une suite de mots. Si cest 4, un synonyme ou 5
une charade
Il faut souvent épeler un mot, parfois imiter
le cri dun animal ou raconter une histoire en plaçant certains
termes.
En répondant juste, on gagne une carte dont le verso représente
la tête, le corps ou les pieds de vingt personnages sympathiques
et stéréotypés. Lobjectif est bien sûr
de composer le plus grand nombre de personnages en entier
Le jeu
conduit à plus de 800 combinaisons différentes. Certains
mélanges sont étonnants (voir illustration).
Truffé
de gags
Avec ce genre de support dapprentissage, on samuse tout
en améliorant lorthographe. Et ce pour moins de 20 francs.
Avec Séki, les gags se cachent même là où
on ne les attend pas forcément. Un seul exemple, tiré
des règles du jeu. A la question «qui commence?»
la réponse déconcerte: celui ou celle qui porte des chaussettes
rouges, aime les navets ou accepte de faire la vaisselle ce soir! «Si
après cinq minutes, vous navez toujours pas commencé,
essayez avec le dé
» On joue au Séki en famille
et même à lécole, depuis que des enseignants
lont introduit dans leurs ateliers pratiques. «Mais les
parents et les instituteurs ne gagnent pas forcément»,
avertit Martino Toscanelli. Pour lanecdote, ce boute-en-train
(attention: ne pas oublier les traits dunion, sachant que trait
dunion nen prend pas!) a la particularité de ne pas
seulement jongler avec les mots, mais aussi avec les notes. Lhiver
passé, il était par exemple aux commandes du piano de
la revue humoristique FriBurnes.
La petite maison dédition fribourgeoise fait depuis 1999
le pari de créer des jeux éducatifs et humoristiques.
Une idée que lon doit
à Agnès Toscanelli, logopédiste de 53 ans, à
son fils Martino, 24 ans, maître en programmation neurolinguistique,
et au graphiste Laurent Kaeser, 25 ans. Cest laînée,
également formatrice en didactique, qui est à lorigine
de laventure. Travaillant depuis longtemps avec des enfants, elle
leur bricolait des jeux originaux à ses heures perdues. «On
a eu envie de pousser lidée plus loin, explique son fils.
On aurait pu se contenter dêtre des auteurs, mais on souhaitait
maîtriser le concept nous-mêmes.» Bref, «fada!»
gère ses idées de A à Z, chaque lettre ayant son
importance
Et cette petite entreprise qui ne connaît pas la crise regorge
de projets. Elle élabore actuellement un jeu dapprentissage
à la lecture pour les 4-7 ans. Sortie prévue: lan
prochain. Faisant leurs expériences, progressant palier par palier
(attention: un «l» à palier, contrairement au verbe
pallier), les Fribourgeois savent que le marché romand ne peut
seul assurer la rentabilité de leur maison dédition.
Cest pourquoi il sagira à lavenir dêtre
diffusé aussi en France. Mais cest encore de la musique
davenir
Séki
en trois questions
Pourquoi avoir choisi dappeler votre maison dédition
«fada!»?
Martino Toscanelli. Parce que ça illustre à merveille
notre douce folie humoristique. On la trouvé en cherchant
dans un dictionnaire de synonymes!
Lorthographe,
nest-ce pas un épouvantail pour les enfants?
Dabord, Séki est un jeu. Et au fil des parties les enfants
apprennent le vocabulaire sans même sen rendre compte. On
retient les mots beaucoup plus facilement en jouant. Cest aussi
une façon pour nous de démythifier lorthographe:
ce nest pas si difficile que cela et cest même très
rigolo.
Pourquoi
bouder le support informatique, plus dans lair du temps quun
jeu de cartes?
On suit une démarche qui va à linverse de lordinateur.
On travaille sur le côté chaleureux de la matière.
Mais peut-être quon utilisera un jour linformatique.
Cest sans doute un outil intéressant pour le drill, pas
forcément pour lapprentissage. Ce nest en tout cas
pas mauvais en soi, même sil existe beaucoup de jeux violents
que je ne cautionne pas. Lordinateur, cest comme la télé:
tout dépend de la manière de sen servir.
Sébastien
Julan /
23 mai 2002