Bas-Intyamon
Noces reportées de justesse

Les citoyens du bas Intyamon ont été informés hier du report de la votation sur la fusion de leurs quatre communes. La cause? Une nouvelle analyse financière qui impose un impôt de 95 ct, avec une classification en classe 5. Avec le risque d’un échec, à Grandvillard notamment.


La prochaine votation sur la fusion est reportée? Directon la classe 5. On grogne à Grandvillard

Les citoyens d’Estavannens, Enney, Grandvillard et Villars-sous-Mont ont reçu vendredi dans leur boîte aux lettres une information selon laquelle le vote sur «la fusion est reporté à une date ultérieure». La décision a été prise mardi lors de la séance du comité de fusion. Cause de ce renvoi: les mauvaises prévisions financières qui auraient contraint la future commune à un impôt de 95 ct.
«Au risque de se retrouver devant un échec le 13 juin prochain, nous avons préféré reporter la fusion des quatre communes d’un ou deux ans.» Hermann Jungo, président du comité de fusion et vice-syndic d’Enney, reconnaît que la décision, au terme de plus d’une année et demie de travail, a été prise dans la déception. Lancée par Grandvillard, la proposition de renvoi a été soutenue par Enney, alors qu’Estavannens et Villars-sous-Mont estimaient qu’il valait la peine d’aller au terme du processus amorcé. La séance d’information, prévue pour le 23 mai, aura lieu séparément dans les quatre communes.
Livrée à la fin du mois d’avril, l’analyse financière du Département des communes, basée sur les comptes 2001 et le budget 2002, a tôt fait de refroidir les enthousiasmes de ceux qui pensaient le mariage du 13 juin prochain déjà scellé. Alors que l’ensemble du processus reposait sur un taux d’impôt de 90 ct. et une classification en classe 6, les nouveaux calculs hissaient la future commune en classe 5 avec un impôt de 95 ct. «Nous aurions pu partir avec un impôt à 90 ct., mais avec la quasi certitude de devoir l’augmenter rapidement. Par souci de transparence et de respect des citoyens, nous avons préféré renoncer», explique le président Jungo.

Difficile à Grandvillard
Roland Kaeser, syndic d’Enney, reconnaît que «le risque d’aller devant un échec, spécialement à Grandvillard, était grand. Et c’est très difficile de venir une deuxième fois avec un projet de fusion. Mais les derniers chiffres ont souligné l’augmentation de l’endettement par habitant et la réduction de la marge nette d’autofinancement. Nous n’avions plus de capacité d’investissement.» Avec ses 80 ct. d’impôts, la commune de Grandvillard (classe 6) était en effet appelée à faire le plus de sacrifices. Le syndic Jacques Overney le reconnaît: «Avec un impôt de 95 ct., ce projet de fusion était assuré d’un échec. Mais le conseil communal reste entièrement acquis à l’idée de cette fusion. Au lieu du début 2003, ce sera le début 2004, comme nous l’avions prévu dans un premier temps. Ou, au pire, au début 2005.»
La santé financière des prochains mois serait-elle suffisamment bonne pour remettre la fusion sur les rails? Rien n’est moins sûr, et «c’est ce qui fait peur aux responsables communaux qui se trouvent devant beaucoup d’inconnues, explique Gilles Ballaman, économiste au Département des communes. Nos chiffres sont avancés avec prudence. Il faut relativiser les résultats mais, quoi qu’il en soit un impôt de 90 ct. permettra difficilement d’avoir une assise financière convenable.» Principale inconnue: la nouvelle classification des communes attendue pour la fin septembre. Si Villars-sous-Mont (classe 5, impôt à 90 ct.) et Estavannens (classe 6, 1 fr.) devraient rester stables, Grandvillard pourrait monter en classe 5 et Enney (1 fr.) passer dans la même. Ce qui modifierait considérablement les résultats. A Grandvillard, le syndic Overney n’exclut d’ailleurs pas, hors de tout processus de fusion, une augmentation d’impôt «de 5 ou 10 ct.» cet automne déjà.
Et si les chiffres de la prochaine étude confirmaient les précédents, les trois communes partiraient-elles seules? Pour le syndic Overney,
l’hypothèse n’est pas envisageable: «Elles ont besoin de Grandvillard. Et si notre commune s’opposait, celle d’Estavannens a déjà annoncé qu’elle pourrait se tourner vers Gruyères.» Cette fusion à trois, Gilles Ballaman l’estime peu probable: «La situation financière serait identique, avec un coefficient d’impôt à 95 ct. Ce qui ne constituerait pas un frein en cas de votation puisque seul Villars-sous-Mont subirait une augmentation. Quant à la commune de Grandvillard, elle ne connaît pas de problèmes financiers, notamment grâce aux apports d’une centrale électrique et de l’armée. Mais jusqu’à quand cette situation va-t-elle durer?»
Les fiançailles sont donc gelées pour quelques mois. Le trousseau était pourtant prêt. La question, qualifiée de «délicate», du nom de la commune avait trouvé un consensus dans l’appellation «Bas-Intyamon». Et Grandvillard avait été choisi comme siège administratif de cette future commune de 1500 citoyens. La dote du mariage était, quant à elle, de 780000 francs.

Patrice Borcard / 18 mai 2002