Profession sommelier
Pour le plaisir des autres

Sommelier fraîchement diplômé, Nicolas Scheuch, d’Hauteville, fait découvrir à une quarantaine d’élèves les joies du service, dans le cadre des journées à thèmes du CO de la Gruyère.


Nicolas Scheuch: «Un sommelier aime par-dessus tout servir des clients qui repartent contents de l’attention qu’on leur a portée» (C. Bosset)

L’envie de partager son savoir et sa passion. L’espoir de susciter, peut-être, des vocations. C’est pour ces raisons que Nicolas Scheuch, d’Hauteville, a décidé de participer aux journées à thèmes du Cycle d’orientation de la Gruyère et d’initier une quarantaine d’élèves au métier de sommelier.
Une profession peu promue – notamment dans le canton de Fribourg, qui ne dispose pas de filière de formation – et parfois mal considérée. «On n’en retient souvent que les aspects considérés comme négatifs: une rémunération au départ assez modeste – 3350 francs bruts au sortir de l’apprentissage, selon la convention collective – mais aussi la contrainte des horaires et le fait de devoir travailler le week-end», reconnaît Nicolas Scheuch. Mais lui qui, à 20 ans, vient d’obtenir son CFC de sommelier, couronnement d’un apprentissage effectué à l’hôtel Cailler, à Charmey, et des deux années de formation suivies à l’Ecole professionnelle de Montreux, l’affirme: «Pourtant, c’est une profession variée, où l’on apprend en permanence, et qui offre de nombreux débouchés. De plus, dans un secteur où travaillent trop de gens peu ou pas qualifiés, les sommeliers serveurs diplômés sont très recherchés. Il s’agit vraiment d’une profession d’avenir: les restaurateurs ont de plus en plus conscience que l’excellence du service fait partie de la satisfaction du client.»
Mais quelle est-elle, cette profession? «En Suisse, hormis dans des écoles spécialisées telles que celle de Changins, la formation de sommelier ne se limite pas à la responsabilité des vins, mais inclut l’ensemble du service. Ce qui implique des compétences techniques (du dressage d’une table au découpage des viandes et au flambage), une bonne connaissance des produits (vins et spiritueux, apéritifs et cocktails, mais aussi la cuisine) et des qualités dans le domaine de la vente, c’est-à-dire des rapports avec le client, de l’accueil au départ.» Ce dernier aspect va d’ailleurs être étendu dès l’an prochain, puisque la formation passera à trois ans.
Nicolas Scheuch a embrassé la profession de sommelier alors qu’il étudiait au Collège du Sud. «J’étais attiré par des domaines comme le tourisme, l’accueil. J’ai alors interrompu mes études, fait quelques stages dans des établissements gruériens – au restaurant de La Tour ou au Vignier, par exemple – avant d’entrer au Cailler. Là, la diversité des activités – brasserie, restaurant gastronomique, banquets, etc. – m’a permis de mettre en pratique presque tous les aspects du métier.» Depuis le 1er août, il travaille au restaurant de l’hôtel Palafitte, un cinq étoiles construit sur pilotis à Neuchâtel à l’occasion d’expo.02. Un standing qui lui offre l’occasion de pratiquer découpages et flambages en salle, ou encore de parfaire sa connaissance des cigares. Car c’est aussi cela, le métier de sommelier serveur.

«Il faut être diplomate»
«En fait, ce qu’un sommelier aime par-dessus tout, c’est de servir des clients qui repartent contents de l’attention qu’on leur a portée. Et qui reviennent.» Bien servir, avec aussi le secret espoir d’arrondir ses fins de mois. «Si l’on fait bien son travail, on peut espérer 200 à 300 francs de pourboire par mois, ce qui est bienvenu.» Les qualités humaines requises? «Etre diplomate», répond Nicolas Scheuch du tac au tac. «Il faut savoir gérer les situations rapidement et sans perdre son calme. Souplesse et sang froid sont donc indispensables. Et, avouons-le, il faut être un petit peu maniaque!»
A la pointe de sa profession – alors qu’il n’était qu’apprenti, il a terminé 15e sur 25, et avec une médaille de bronze, au Championnat suisse de service de Bâle et est actuellement en lice pour représenter la Suisse aux Olympiades des métiers organisées en 2003 à Saint-Gall – Nicolas Scheuch caresse le projet de parfaire sa formation dans une école hôtelière, afin d’accéder plus rapidement à des postes mariant service et gestion. Maître d’hôtel, F&B (food and beverage) manager: des places auxquelles un «simple» sommelier peu prétendre après une dizaine d’années d’expérience seulement. Sera-t-il alors remplacé par les jeunes du CO qui découvrent aujourd’hui et demain les joies du service? Peut-être par l’un de ceux qui n’auront pas perdu leurs moyens au moment de flamber leur dessert et qui ne se seront pas mélangés les shakers entre la vingtaine de cocktails (sans alcool) qu’il leur propose de réaliser…

Didier Page / 29 août 2002