Bossonnens
Le Moyen Age à la truelle

Depuis 1996, une équipe d’ouvriers s’attache à consolider les ruines du bourg médiéval de Bossonnens. Après la tour de guet et la muraille, ce sont les restes du donjon et du château qui seront renforcés. Une opération délicate, réalisée par une association d’entreprises de la région.


La mise à jour du vieux bourg dure depuis plus de six ans (M. Angel)

Dégagées des broussailles, exhumées, consolidées: voilà plus de six ans que les ruines du petit bourg médiéval de Bossonnens retrouvent peu à peu un visage et une architecture identifiable. Une œuvre de longue haleine, initiée par Joseph Cottet, et qui devrait passer à la vitesse supérieure en septembre, au pire dès le printemps. Tout dépendra du succès de la recherche de fonds que mène l’ancien conseiller d’Etat qui, à presque huitante ans, consacre une large part de son temps à jeter les bases de ce futur parc archéologique.
Depuis les premiers coups de truelle, la petite équipe du chantier – un effectif variable de chômeurs employés en programme d’occupation et en stage de réinsertion, et dirigées par Michel De Nicola, puis par Pierre Python – totalise déjà quelques réalisations. Les reliques de la tour de guet, hautes de treize mètres (elle atteignait près de 26 mètres), se dressent maintenant solidement à l’une des extrémités des fortifications. Et de l’autre côté, les travaux de renforcement de la muraille (20 mètres de moellons, 12 de haut et 3 d’épaisseur), entamés en été 1998, ont révélé trois fines meurtrières. «Une surprise, puisqu’une seule ouverture était visible», se réjouit Joseph Cottet, l’initiateur du projet, qui soupçonne l’existence d’une poterne dérobée quelques mètres plus loin.

Des travaux délicats
Les travaux réalisés à ce jour, subventionnés, ont bénéficié du concours gratuit de plusieurs entreprises et du financement de la commune, qui a fait l’acquisition du site. Mais la suite des opérations, délicate, est d’un tout autre acabit. Son objet? Consolider les restes du donjon carré (douze mètres de côté et jusqu’à huit de haut), du corps principal du château et du parement soutenant ses fondations. «Il faudra déplacer, nettoyer, bétonner et replacer les imposants blocs de poudingue qui forment les murs du donjon et du parement», explique Joseph Cottet. Une tâche qui monopolisera des engins, un maçon, des manœuvres et un machiniste pendant trois mois environ. La troisième tranche de travaux, plus simple, sera effectuée simultanément par des étudiants ou des chômeurs, et concernera les remparts du bourg et son porche d’entrée.
L’Association pour la mise en valeur des vestiges médiévaux de Bossonnens a confié à deux entreprises de la région, Conquoz Constructions SA et Emonet Raymond SA, le soin de deviser et de réaliser la deuxième «tranche» de réfection. Coût des travaux: 300000 francs environ, subventionnés à 40% par la Confédération et le canton. Une somme à laquelle il faut joindre les contributions de la Loterie romande, d’une société d’archéologie et de divers donateurs. «Il manque seulement 50000 francs», déclare le président Joseph Cottet. «J’ai contacté les communes de plus de 1000 habitants, en obtenant quelques réponses. Mais la collecte est difficile. Bossonnens est excentré et ne compte aucun gros sponsor. C’est un lourd handicap.»
Pour l’ancien conseiller d’Etat, l’importance architecturale du site mérite pourtant qu’on persévère. «A l’époque déjà, mon instituteur Hubert Gremaud déplorait qu’on laisse ce patrimoine livré à l’oubli. Il préconisait des recherches historiques. Elles ont été effectuées par Mgr Hubert Savoy et plus récemment par l’historien Ivan Andrey, dont je suis en train de vulgariser l’ouvrage. C’est ce qui m’a incité à entreprendre ces travaux de réfection. Ils serviront à l’histoire du village et même à celle de la Romandie.»

Un bourg sous la frondaison
D’une superficie d’un hectare environ (200 mètres sur 20), le site médiéval fortifié de Bossonnens a été construit entre le XIe et le XIIIe siècle.
Il comporte d’un côté une chapelle datant du XIIe siècle, ainsi que le corps principal du château, son donjon, ses dépendances et le puits. De l’autre côté de l’enceinte s’étend le bourg, encore masqué par les arbres, et qui recense vingt-trois chésals (maisons), ainsi qu’un four. Au bout trône la tour de guet.
Le château de Bossonnens fut le fief successif des Lothaire II, des Blonay (1068), puis des Oron (1220) et des La Sarra (1410), avant de devenir bailliage fribourgeois en 1536.

Stéphane Sanchez / 13 août 2002