COMMENTAIRE

Proche-Orient
La logique de l’impasse

Les attentats palestiniens meurtriers se succèdent, les ripostes armées (et plus meurtrières encore) de l’Etat d’Israël se multiplient. Depuis le début, le 29 septembre 2000, de la deuxième Intifada, qui avait fait suite immédiate à la visite d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, les perspectives de paix entre Israéliens et Palestiniens se sont chaque jour inexorablement amenuisées. A tel point qu’on n’ose guère voir dans l’ouverture de négociations par le chef de la diplomatie Shimon Peres – avec l’autorisation donnée à contre-cœur, hier, par Sharon – autre chose qu’une concession faite par le Premier ministre pour sauver son gouvernement de coalition. Le fait que Sharon ait imposé à Peres, dans ses futures négociations, un chaperon militaire en la personne du chef du département des opérations de l’armée, est assez symptomatique de la vision obtuse du chef de l’Etat, pour qui un cessez-le-feu s’impose par le feu et la force. Cette vision est illusoire: la suprématie armée d’Israël se révèle impuissante à empêcher les opérations meurtrières des kamikazes du Hamas ou du Djihad islamique. Dimanche, un nouvel attentat-suicide perpétré près d’Haïfa, a de nouveau prouvé que les mouvements intégristes pouvaient frapper n’importe où en Israël, non seulement à Jérusalem ou à Tel-Aviv, mais aussi dans un arrière-pays qui se croyait jusque-là préservé. Tout aussi illusoire est l’idée de mettre fin au nationalisme palestinien en réduisant à néant son appareil politique. Or c’est précisément ce à quoi s’attache Ariel Sharon depuis son arrivée au pouvoir en février dernier, détruisant toujours un peu plus le bénéfice des accords d’Oslo, qui avaient permis l’établissement de territoires autonomes (Gaza et Jéricho) sous autorité palestinienne. L’occupation israélienne, annoncée comme définitive, de la Maison d’Orient, siège de l’OLP à Jérusalem-Est, ne fait qu’affaiblir encore l’autorité (ou ce qu’il en reste) de Yasser Arafat et de son cabinet, en même temps qu’elle attise la radicalisation du conflit et justifie le recours à la violence. Cette impasse, que contemplent une communauté internationale et surtout des Etats-Unis incroyablement apathiques et inactifs, ne peut mener qu’à l’escalade des attentats et des représailles. Avec pour victimes deux peuples qui aspirent l’un à la sécurité, l’autre à sa propre terre. La voie vers la réalisation de ces deux aspirations est pourtant connue depuis longtemps. Elle passe par l’application de la résolution 242 de Conseil de sécurité de l’ONU, qui exigeait d’Israel, en 1967, le retrait des territoires occupés. Et elle passe par l’achèvement plein et entier d’une résolution plus vieille encore: celle qui, en 1947, prévoyait la création en Palestine d’un Etat juif et d’un Etat arabe.

Didier Page / 14 août 2001

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