Pour Michaël Sudan et Alain Suter, le derby de dimanche à la patinoire de Romont entre le CP La Glâne et le HC Bulle-la Gruyère aura une saveur particulière. Coéquipiers l’an passé à Espace Gruyère et surtout amis depuis une dizaine d’années, l’attaquant glânois et le dernier rempart bullois se retrouveront opposés pour la première fois de leur carrière.
Certes, l’issue de la rencontre ne touchera en rien à leur complicité. Mais, le moment venu, leur fierté de hockeyeur leur imposera de prendre le dessus. «Si tu te présentes seul face à moi, je sais ce que je dois faire, assure Alain Suter. Je connais tes trucs. Mais on ne sait jamais, tu vas peut-être changer quelque chose?» – «Je ferai ma feinte habituelle, mais un peu plus vite, rétorque Michaël Sudan. Je pense quand même que j’aurai pas mal de pression. La saison passée, je me rappelle qu’à l’entraînement j’avais passablement de peine à te marquer des buts.»
Leur relation, le Riazois Michaël Sudan et le Bullois Alain Suter l’ont tissée au fil des nombreuses saisons passées en commun. Au sein du mouvement juniors de Bulle-la Gruyère et de Fribourg-Gottéron d’abord, puis en 2e ligue, sous le maillot de Château-d’Œx et de la première équipe bulloise. «A Bulle, durant les années moskitos et minis, on allait patiner ensemble à la moindre occasion, se souviennent-ils. En plus des entraînements, nos parents nous amenaient presque tous les week-ends à Charmey.»

Rencontre à la maternité
Cette saison, s’ils ne défendent plus les mêmes couleurs, les deux hommes continuent de cultiver leur amitié. «On se voit souvent le week-end. Nos copines s’entendent bien, c’est déjà une bonne chose (rires)!» Le hockey sur glace est à l’origine du lien qui unit aujourd’hui les deux compères de 21 ans. Pourtant, leur première «rencontre» n’a pas eu pour cadre une patinoire, mais… la maternité de Riaz, en 1984. «Je suis né le 13 avril, Michaël le 14, raconte Alain Suter. Nos mamans s’étaient retrouvées dans la même chambre!»
Dimanche à Romont, les deux hommes se changeront dans deux vestiaires séparés, au sein d’équipes qui n’aspireront qu’à une chose: remporter le derby. «Cela fait un moment que l’on attend ce match, relèvent-ils. Entre joueurs, quand on se voit le week-end, on se met pas mal de pression.» Une pression qui pèsera peut-être un peu plus sur les épaules bulloises. «On n’est pas du tout dans la même situation que La Glâne, souligne Alain Suter. Pour l’instant, on se bat pour être au-dessus de la barre. L’important pour nous est d’engranger des points, que ce soit contre le dernier ou le premier.»
Membre de la première triplette glânoise, Michaël Sudan assure que sa formation ne fera pas de cadeau. «On a une première place du classement à garder, peu importe l’adversaire. Dimanche, on va jouer la carte de l’offensive d’entrée de jeu.» Et le centre d’ajouter: «Mon vœu est que le public assiste à une belle partie et que l’arbitre ne “casse” pas cette rencontre, ce qui arrive parfois lors des derbies. Et si l’affrontement devait déboucher sur quelques malentendus entre joueurs, j’espère qu’ils ne dépasseront pas le cadre des soixante minutes de jeu.»

«Des buts bêtes»
Avec cinq défaites en autant de rencontres, le HC Bulle-la Gruyère a connu une entrée en matière laborieuse. «Commencer la saison ainsi, c’est dur, glisse Alain Suter. On n’avait pas de réussite, notamment en attaque. Quant à moi, j’encaissais des buts bêtes, que je ne prenais pas la saison précédente.» Le gardien gruérien évoque aussi une part de malchance, en repensant aux trois revers concédés sur la plus petite des marges. «Contre Sarine, on menait encore à la 55e minute. A Fleurier, on a encaissé le but décisif à sept secondes du terme. Quand on donne tout et que l’on a rien au bout, ça fait mal. De plus, on était souvent rattrapés par nos émotions et on prenait beaucoup trop de pénalités.»
Depuis, les protégés de Laurent Wyss se sont bien repris et restent sur une série de trois rencontres sans défaite. Les bonnes performances d’Alain Suter ne sont d’ailleurs pas étrangères au redressement bullois. «J’ai conscience que l’on compte davantage sur moi que la saison passée», relève l’étudiant en géographie à l’Université de Fribourg. «Comme on avait une super équipe et que l’on marquait beaucoup de buts, j’avais peut-être un peu moins de pression. Cette année, on n’a pas dans nos rangs des éléments du calibre des frères Kilchoer, capables de faire la différence à tout moment.»
Emmenée par le vieux briscard Patrice Brasey, La Glâne connaît pour sa part un début de championnat tonitruant, avec douze points en sept matches. «Comme on venait de monter en 2e ligue, les adversaires nous ont peut-être pris à la légère, explique Michaël Sudan. Quand on a égaré nos premiers points contre Uni Neuchâtel, lors du quatrième match, certains ont peut-être pensé que l’on n’était plus assistés par la chance du néopromu. Mais cette défaite 6-0 nous a remis en place.» En battant notamment par la suite Fleurier, candidat à la promotion, les Glânois ont prouvé que leur position de leaders ne devait rien au hasard. «En gagnant dimanche, nous serions certains de terminer premiers au terme du premier tour», ajoute le polymécanicien.
Les Bullois l’entendront-ils de cette oreille?

Propos recueillis par Alain Sansonnens 1er décembre 2005

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