CYCLISME Police du tour de romandie

Au service de ses coureurs

Une voiture qui débouche d’une ruelle, un piéton inattentif ou un rond-point mal signalé: les dangers potentiels ne manquent pas pour le peloton de la boucle romande. Garante de la sécurité des coureurs, l’escouade de la police du Tour joue un rôle essentiel. Deux Bullois, Alec Gambini et Jean-Paul Savary, font partie de cette garde rapprochée.


S’ils vivent la course intensément, Alec Gambini (à gauche) et Jean-Paul Savary ne savent souvent pas quel coureur a levé les bras sur la ligne d’arrivée

«On n’est pas là pour regarder la course, mais pour assurer la sécurité des cyclistes. Une échappée nous intéresse dans la mesure où il y a quelque chose à faire au niveau de la sécurité.» Sur leurs deux-roues, à proximité des acteurs du Tour de Romandie, Alec Gambini et Jean-Paul Savary jouissent d’une position privilégiée. Mais ils ne vivent pas pour autant une étape comme le quidam devant son poste de télévision. «On ressent l’ambiance régnant au sein du peloton. Mais on sait rarement qui franchit la ligne en premier.»
Les deux Bullois font partie des quelque trente motards bénévoles, répartis en deux groupes, qui sillonnent les routes empruntées par la boucle romande. La première section – le groupe «sécurité», composé de vingt motards – passe environ un quart d’heure avant le peloton. Sa mission: fermer les routes [n.d.l.r.: en Suisse, il est interdit de boucler un secteur routier] et rendre les coureurs attentifs à certains passages critiques, comme des ronds-points ou des bornes. Le groupe «police du Tour» – dont Alec Gambini est le responsable et Jean-Paul Savary le suppléant – s’occupe de la sécurité rapprochée des coureurs. «Notre rôle est d’assurer la circulation de dernière minute. On doit sentir le danger et agir en conséquence. Il peut parfois y avoir des trous dans la sécurité: une croisée pas fermée ou un obstacle sur la route pas suffisamment bien signalé.» Alec Gambini œuvre à l’avant du peloton avec trois de ses compères, Jean-Paul Savary à l’arrière. «Notre groupe est un peu plus “voltigeur”, explique ce dernier. Je suis l’homme de liaison avec le directeur de course Tony Rominger.» Si une échappée se forme et compte plus d’une minute d’avance, un motard est immédiatement placé entre les «fuyards» et le peloton.
Ne devient pas motard du Tour de Romandie qui veut. Les personnes engagées appartiennent au Club moto police suisse, dont les membres sont quasiment tous des policiers – ou d’anciens policiers – et des magistrats. «Le club s’est spécialisé dans ce domaine, expliquent les Bullois. La plupart participent à d’autres courses, comme le Tour de Suisse, la Pascal Richard, le Tour du lac Léman ou le Triathlon de Lausanne. Notre équipe fait de l’accompagnement cycliste une douzaine de fois par année. Mais quand un motard vient sur le Tour de Romandie, il n’en est pas à son coup d’essai. Il est déjà au bénéfice d’une certaine expérience acquise sur d’autres épreuves.»

Le tracé à la vidéo
Si les coureurs accumulent les kilomètres en prévision d’un rendez-vous important, les escorteurs ne subissent pas un entraînement particulier. «On reçoit notre moto – une Yamaha type semi-route, mise à disposition par l’importateur suisse – une dizaine de jours avant le début du Tour, expliquent Alec Gambini et Jean-Paul Savary. A chacun de s’entraîner de son côté.» Les motards se rassemblent tout de même une fois, afin de réexpliquer les règles du jeu ou de prendre connaissance d’éventuels nouveaux règlements de course. Le matin du coup d’envoi de la boucle romande, ils participent à une séance avec Marc Biver (directeur général), Yves Mittaz (directeur) et Tony Rominger (directeur de course). «Avant chaque étape, on visionne une vidéo du parcours du jour, ajoutent les deux Bullois. On discute des passages délicats. On regarde où la sécurité est prise en charge par la commune traversée – généralement des gendarmes ou des pompiers – et où l’on est susceptibles d’intervenir.» Après la course, rapport auprès des patrons du Tour, qui signalent les points à améliorer.

Cyclistes plus rapides
Une organisation, même des plus professionnelles, n’enlève pas toute peur aux policiers de la route. «Par rapport aux voitures, on craint la petite ruelle ou la sortie de garage auxquelles on n’aurait pas pensé.» Ou le véhicule au milieu du parcours, comme lors du Tour de Suisse 1986, lorsque l’Italien Claudio Chiappucci s’était retrouvé sur un capot. «Dans les villes, il faut être très attentif aux piétons, surtout aux enfants.» C’est là que les motards ont un rôle important, en jouant du klaxon et du sifflet. «On doit faire preuve d’autorité.» Et parfois avoir l’œil dans les rétroviseurs. «Dans les descentes, les cyclistes empruntent des trajectoires différentes et sont plus rapides que nous dans les virages.»
De manière générale, les rapports entre motards et professionnels de la petite reine sont courtois. «Les cyclistes savent qu’on est là pour assurer leur sécurité. Si on les gêne, ils nous le font savoir immédiatement par des signes. On a davantage de difficultés avec les directeurs sportifs, qui passent parfois très près de nous lorsqu’ils remontent la file pour aller à la hauteur d’un coureur.»
Une semaine passée entre copains passionnés de moto est une chose, la réalité de l’exploit sportif une autre. «On est en admiration devant les coureurs. Quand, dans un col, notre moto chauffe en deuxième vitesse, le moteur du cycliste chauffe aussi.»

Le Gruérien dans le coup

Au terme de la 1re étape d’hier entre Genève et Fleurier, on peut désormais l’affirmer: Pierre Bourquenoud tient la forme. Derrière le baroudeur du jour, le Transalpin Simone Bertoletti (Lampre), le Gruérien de Jean Delatour a terminé à 1’09, en compagnie du peloton de tête, réduit à une cinquantaine de coureurs. «Je suis très satisfait d’avoir pu accrocher le bon wagon. Pour jouer la gagne, j’étais limite. Sur la fin, j’ai dû me faire violence. Je n’ai même pas essayé de sortir du groupe. J’avais les “cannes” dures et j’ai souffert du mauvais temps.» Les pluies diluviennes n’ont pas empêché Bertoletti de réaliser un joli numéro. «Il a dû rouler fort, assure Pierre Bourquenoud. Car derrière, dès que le Team CSC et Phonak ont pris les choses en main, la course est allée très vite. Cette étape a d’ailleurs fait des dégâts.»
Le professionnel de Vaulruz n’a pas été le seul coureur de sa formation à souffrir. Laurent Lefevre, un des deux leaders avec Patrice Halgand, a connu la chute quelques kilomètres après Yverdon. «Dans un premier temps, on l’a attendu, raconte Bourquenoud. Après, on est repartis sans lui, car il a tardé à se relever. Cet incident a déstabilisé l’équipe.» Qui a dû «rouler» pour rejoindre le peloton au pied de la première des trois bosses au programme, à 120 kilomètres de l’arrivée.
La veille, lors du prologue de Genève, Pierre Bourquenoud (89e à
22 secondes) n’a pas cherché à jouer les équilibristes. Au contraire du trio de tête helvétique Fabian Cancellara-Alexandre Moos-Laurent Dufaux. «J’ai dû perdre une seconde par virage, plaisante le Gruérien. J’ai roulé à bloc, mais sans prendre de risques. Je ne voulais pas hypothéquer mes chances pour la suite à cause d’une chute. De toute manière, je n’avais aucune chance d’enlever ce prologue, car je ne suis pas un coureur explosif.»


Bourquenoud fait son Tour

2e étape - 1er mai
Val-de-Travers/Couvet - Lucens (178,2 km)

L’étape proposée entre le Jura neuchâtelois et la Broye vaudoise consacrera certainement un spécialiste des embardées finales. «En principe, ce sera la seule étape réservée aux sprinters. Il y aura peut-être quelques tentatives d’échappée au départ. Mais les équipes des sprinters devraient reprendre les choses en main à l’approche de l’arrivée. Cette journée ne sera pas pour moi. Je laisse ça aux spécialistes.»

3e étape - 2 mai
Moudon - Loèche-les-Bains (171,3 km)

Cette étape devrait normalement sourire à un grimpeur. Depuis Sierre, les quelque 20 derniers kilomètres s’effectuent en montée. «A part ça, le reste est plat. Une échappée se dessinera sans doute dans la première partie de l’étape. Le peloton laissera l’écart atteindre six ou sept minutes. Mais les équipes des candidats au classement général vont revenir avant la montée finale. Après, l’ascension vers Loèche-les-Bains se résumera à une course de côte. C’est là que les choses sérieuses commenceront, même si le Tour de Romandie ne sera pas joué au terme de cette étape. Par contre, certains auront déjà perdu leurs illusions. Pour moi, ce sera un bon test. J’espère effectuer une bonne montée finale. Mais ce n’est pas sur cette étape que je prendrai des risques. J’attendrai le lendemain, vers Les Paccots.»

 

Alain Sansonnens
1er mai 2003

Une I Editorial I Gruyere I Veveyse/Glâne I Fribourg

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