FOOTBALL 1re LIGUE
Démission de Francis Sampedro
«Je ne suis pas aigri»

Francis Sampedro a démissionné mercredi soir de son poste d’entraîneur du FC Bulle. Une lourde défaite à domicile face à Carouge (0-5) aura été le détonateur d’une décision en gestation depuis deux semaines. Le désormais ex-mentor de Bouleyres s’explique.


Francis Sampedro: «Pour que l’équipe montre sa vraie valeur, il lui faudra un autre discours et une autre discipline» (M. Rouiller)

Coprésident du FC Bulle, Patrice Bertherin le dit volontiers: avec les démissions conjointes de Francis Sampedro et de son assistant Luca Perazzi, il perd plus que deux entraîneurs, mais bien deux amis. Après quinze ans passés sous les couleurs du FC Bulle – d’abord comme joueur puis six ans en tant qu’entraîneur – Francis Sampedro a décidé que le club de Bouleyres continuerait l’aventure sans lui. Homme de principes, il revient sur les raisons de sa démission.

– Francis Sampedro, comment avez-vous vécu le match face à Carouge?
C’était un cauchemar! On encaisse le premier but sur un hors-jeu, puis tous les petits détails se sont enchaînés contre nous. Ensuite, certains joueurs n’ont pas eu la réaction ou l’envie de révolte nécessaires pour revenir au score. Je n’ai jamais senti qu’on pouvait renverser la vapeur. Vingt minutes avant la fin de la rencontre, ma décision était prise.

– A propos de ce match, on a beaucoup évoqué votre choix de faire évoluer David Julmy au poste de libero à la place de Benoît Descloux…
Les décisions tactiques ne concernent que moi, les gens peuvent dire ce qu’ils veulent. C’était une décision réfléchie. Je trouvais qu’on jouait trop bas sur le terrain. Je pensais que Julmy pouvait améliorer cela, même si je savais qu’on perdrait en rapidité. Et puis, j’avais senti Descloux assez nerveux depuis le début de la saison. Les choix sont sujets à caution, je les assume.

– Vous avez toujours insisté sur les valeurs morales d’une équipe. Aviez-vous l’impression que votre discours ne passait plus?
J’ai une ligne de conduite et je m’y tient. Elle n’a pas beaucoup varié en six ans. C’est un peu comme un disque. On aime une chanson, on l’écoute souvent, avec beaucoup d’attention. Puis, on finit par s’en lasser. Même si on l’aime toujours, l’attention n’est plus la même.

– Le FC Bulle a la réputation d’être un club à l’ambiance plutôt familiale. Vous pensez que cela a fini par vous porter préjudice?
Etre un club familial est un avantage et ne devrait jamais devenir un handicap. Mais inconsciemment, certains en ont profité un peu et il aurait peut-être fallu taper du poing sur la table. La 1re ligue est un niveau où il faut marier le plaisir et l’exigence. Car les gens sont tout de même rémunérés, même si le montant n’est pas énorme.

– C’est donc autant une question d’attitude que de mauvais résultats qui a motivé votre choix…
L’attitude de chacun dicte la marche à suivre. Moi, je fais confiance aux gens. Pour que cette équipe montre sa réelle valeur, il lui faudra un autre discours et une autre discipline. Je ne voulais pas risquer quoi que ce soit, surtout pas l’enlisement. Je pense avoir pris la bonne décision, en mon âme et conscience. Je préfère partir quand la situation n’est pas catastrophique et laisser à mon successeur le temps de travailler.

– Regrettez-vous d’avoir décidé, en mai dernier, de rempiler pour une année?
Non, pas du tout! L’idée était de garder la même base avec quelques renforts. Ce que je regrette, c’est le début de notre championnat. Avec nos transferts, je pensais qu’on vivrait une meilleure saison.

– Votre assistant Luca Perazzi vous a suivi dans votre choix…
Nous en avions déjà discuté. En cinq ans et demi de collaboration, il n’y a pas eu un seul nuage entre nous. On ne peut pas qualifier une telle relation. Mercredi, nous n’avons pas eu besoin de parler. Lors du 5e but genevois, on s’est regardé, et tout était dit!

– Comment vous sentez-vous aujourd’hui?
Dans ce genre de cas, on est forcément triste. Mais je ne suis pas du tout aigri. Même si je sentais certaines réticences, on ne m’a pas poussé dehors non plus! Cela s’est passé tout naturellement. Et puis, il faut relativiser. Cela reste du sport. Il n’y a pas mort d’homme, personne n’est malade. C’est une situation comme on en voit souvent.

– Qu’allez-vous faire, durant ces prochaines semaines?
Si le temps le permet, je vais m’occuper de mon jardin! Plus sérieusement, je vais devoir m’habituer à un autre rythme de vie, moins stressant. Je vais suivre mon chemin et on verra ce qui arrivera.

– Allons-nous voir Francis Sampedro rôder autour des terrains de football?
Je vais laisser Bulle tranquille pendant un certain temps. J’irai voir jouer mes fils, à Sorens. Pour le reste, je suivrai les résultats dans la presse. En étant moins concerné, mais toujours aussi passionné.

Propos recueillis par
Karine Allemann /
31 août 2002

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