Nicole Dupasquier

Peintre de l’insouciance

Ses personnages ont de la candeur. La légèreté des ballons qui volent au-dessus d’une fête foraine. Dans son atelier de Vuadens, Nicole Dupasquier parle d’insouciance. Portrait d’une pièce.


Nicole Dupasquier: «Je suis motivée, mais j’y vais à l’instinct»

La peinture est venue s’inscrire dans sa vie par petites touches. Mais marquantes! A l’Ecole Moderne, à Bulle, où elle étudiait pour un diplôme de commerce, le directeur et professeur Pierre Gawrysiak débordait le cadre strict des études. Il parlait musique, littérature, peinture. «Bien sûr, je dessinais déjà, mais j’étais plutôt mauvaise en dessin. Les cours de M. Gawrysiak m’ont donné un déclic.»
Nouveau déclic, plus tard, lorsque Nicole Dupasquier voyage. En Thaïlande, elle rencontre une professeure de dessin australienne. «Avec elle, on dessinait une peau de serpent trouvée par terre, ou un insecte mort.» Par ces cours informels, qui attisent son envie de représenter les êtres, Nicole Dupasquier découvre que le dessin est inscrit dans les lignes de sa main. Mais patience, jusqu’à ce que la veine batte. Durant sept ans et demi, elle travaille comme éducatrice auprès de personnes handicapées, à l’enseigne de Clos Fleuri. Puis au Tremplin de Fribourg pour les toxicomanes, pendant six mois. Un travail qui trouve ses limites. «Ras-le-bol? Pas vraiment. C’est une activité qui demande de beaucoup donner. Je devais plus penser à moi.»
Penser à elle, c’est penser à la peinture, qui l’a toujours «démangée». Nicole Dupasquier parvient à concilier les horaires. Tout en s’occupant de sa fille Aude (10 ans), elle travaille comme secrétaire à mi-temps. Elle consacre ses matinées à la peinture, dans l’atelier qu’elle loue au bâtiment Atlantis, à Vuadens. «Dès que je mets les pieds ici, je me sens bien.»
«Je peins comme ça vient. J’y vais à l’instinct. C’est un monde insouciant. C’est un peu dans ma nature d’être insouciante.» Ainsi, sans se «prendre la tête», Nicole Dupasquier aligne les expositions, comme des perles sur un fil. Au centre Atlantis, pour la fête des ateliers, au Foyer Saint-Vincent à Vuadens encore, puis à la boutique de vêtements Magellan, à Bulle. Actuellement, son exposition à la boutique Arts et Fleurs, en «Basse» de Fribourg, fait un tabac.
A quoi la jeune artiste attribue-t-elle cet engouement? «Il y a un côté illustration, décoratif. Je me verrais assez illustrer des contes pour enfants. Et les personnages sont colorés. Du rouge, du jaune. J’aime bien le vert, mais j’ai de la peine avec le bleu.» Elle souligne d’ailleurs que ses compositions au brou de noix, plus ternes, sont pratiquement les seules à n’avoir pas été vendues.
Si elle ne pose pas de jalons, travaillant au jour le jour, Nicole Dupasquier rêve de toucher à l’huile. De réaliser les cadres elle-même. Et de travailler toujours plus le dessin. Elle voue une admiration à Egon Schiele (pour la force), à Klimt (les dessins de femmes splendides), à Toulouse-Lautrec (les scènes carnavalesques) et plus encore à Modigliani (ses couleurs et sa tendresse). Ses personnages, à elle, avancent en «procession». Sans heurt. En douceur.

Pierre Gremaud / 18 mai 2002