Moléson-Vudalla

Les «tonneaux» en retraite

Déclarés «non conformes» aux normes de sécurité il y a près d’une dizaine d’années déjà, la télébenne de Moléson va disparaître d’ici quelques semaines. L’installation, qui aura transporté près d’un million de personnes, n’a jamais été rentable.


Mis en service à la fin de l’année 1963, les «tonneaux» de Moléson
offraient une vue imprenable sur toute la Gruyère

Une page se tourne à Moléson: depuis mardi, une entreprise procède au démontage de la télébenne qui reliait le départ de la station au sommet de la Vudalla (1667 mètres). Déclarée «non conforme» aux normes de sécurité il y a près d’une dizaine d’années déjà, l’installation avait été mise en service à la fin de l’année 1963. Selon les responsables de la station, il aurait été trop coûteux de la moderniser.

Jamais rentable!
Ainsi, les fameux «tonneaux» rouges rejoindront la casse d’ici quelques semaines. Sauf un ou deux, qui devraient être conservés «pour le souvenir». Administrateur de la station, Philippe Micheloud entend également réaménager l’aire de départ en un atelier, afin de donner un peu d’espace à la salle culturelle récemment créée dans l’ancienne gare de la télécabine. Au total, l’ensemble des travaux de démontage et de transformation est devisé à quelque 150000 francs. «A l’origine, l’installation aurait dû partir d’Enney», se souvient Ferdinand Caille, chef d’exploitation de 1964 à l’année dernière. Mais l’entreprise qui l’avait commandée n’était pas parvenue à rassembler l’ensemble des fonds nécessaires. Et la télébenne avait finalement été rachetée par la société Gruyères-Moléson-Vudalla. Durant ses quelque trente années d’existence, elle aura transporté près d’un million de clients, estiment ses responsables. Sans jamais être rentable! «Pour y parvenir, ce genre d’installation nécessite un débit de 100000 personnes par an, précise Ferdinand Caille. Or, nous n’étions qu’à 30000 de moyenne. Le principal handicap, c’est qu’entre le bas des pistes et le départ de l’installation, il y a cinq minutes de marche. Et avec tout le matériel…» Autres points faibles: les vingt minutes de montée et l’absence d’arrêts. L’installation tournant en permanence à plus d’un mètre par seconde, les utilisateurs étaient forcés de sauter en marche. Avec toutes les scènes épiques que cela peut induire. «A la station de départ, il y avait en permanence une galerie de gens pour observer l’embarquement, sourit l’ancien chef d’exploitation. Il faut dire que c’était souvent assez drôle.» Mais les «tonneaux» avaient également leurs inconditionnels: «Je n’ai jamais su réellement pourquoi, mais la clientèle française adorait ça!»

La promenade du CF
Prévue à l’origine pour les skieurs, la télébenne a rapidement drainé une importante clientèle estivale. Surtout depuis qu’au milieu des années 1960, le Conseil fédéral in corpore l’avait utilisée lors de l’une de ses courses annuelles. Depuis, des milliers de randonneurs se sont vus remettre le très officiel «Diplôme de marche pour la promenade du Conseil fédéral». Une renommée estivale qui a sans doute contribué au maintien de l’installation. «Son principal atout, c’est qu’elle offrait une vue à 360 degrés et de nombreuses possibilités de randonnées», conclut Ferdinand Caille. Des randonnées qui ne s’offriront désormais plus qu’aux marcheurs invétérés.

Marc Valloton / 9 août 2001